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Transition énergétique : on navigue dans le brouillard

Publié le 13 mars 2019

Par Damien Chalon
4 min de lecture
ZOOM DE L'OVE. L'Observatoire du Véhicule d'Entreprise pointe du doigt le manque de clarté et de vision dans le débat sur la transition énergétique.

 

"Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément". A quelques jours de la conclusion du Grand Débat National et dans l’attente des arbitrages gouvernementaux sur les différentes contributions citoyennes, l’exécutif serait bien avisé de s’appliquer cette maxime de Nicolas Boileau, figure de proue de la littérature classique du XVIIème. Car en matière de politique énergétique ou de transition écologique, l’heure n’est pas – loin s’en faut – à la clarté.

 

Passons sur le report de la présentation du projet de loi sur les grandes orientations énergétiques de la France (vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage…). Initialement prévue mi-mars, elle n’a fait l’objet à ce stade d’aucun nouveau calendrier. Ce texte est pourtant essentiel puisqu’il doit fixer la trajectoire de la baisse de la part du nucléaire dans le mix-électrique national ou redéfinir les objectifs de la France en matière de baisse des émissions de CO2 pour les quinze prochaines années.

 

Quand la réalité économique rattrape les postures politiques, le risque est grand que les cartes se brouillent. Et que les messages deviennent inaudibles. C’est le cas de la taxe carbone, dont la trajectoire de hausse avait été suspendue par Emmanuel Macron lui-même dans l’espoir de faire retomber la mobilisation des "gilets jaunes". Certains au gouvernement souhaiteraient aujourd’hui la remettre sur les rails, au risque de relancer la contestation sociale. Il est vrai que l’interruption de cette hausse programmée de la taxe carbone représente un lourd manque à gagner pour les finances de l’Etat (on parle de plus de 10 milliards d’euros à horizon de 2022). Soit l’équivalent tout de même de ce que l’Etat attend de la cession de sa participation dans ADP !

 

Même retour douloureux à la réalité sociale dans l’épineux dossier du Diesel. Les clients se sont détournés en masse de cette motorisation accablée de tous les maux. Résultat : les usines spécialisées dans la filière Diesel tournent aujourd’hui à vide et pensent à se délester de leurs effectifs devenus inutiles. Les pouvoirs publics, appelés à jouer les pompiers, se transforment en accompagnateurs de la reconversion des sites industriels touchés et de l’évaluation des compétences dont ces derniers auront besoin dans l’avenir. Et pour éteindre au mieux les incendies qui menacent çà et là en région, d’aucuns proposent d’attribuer aux Diesels les plus récents la vignette Crit’Air 1, dont bénéficient les modèles dits vertueux. Un crime de lèse-majesté pour les jusqu’aux boutistes de la lutte anti-Diesel.

 

Ces différents exemples débouchent en tout cas sur une réflexion : une révolution écologique de l’ampleur de celle qu’appelle la transition énergétique et le sauvetage de la planète ne se décrète pas du jour au lendemain, au gré de tel ou tel scandale industriel. Les constructeurs automobiles, sous la pression des normes européennes décidées – elles aussi – en catastrophe, ont besoin de temps pour faire évoluer leurs outils de production et leurs gammes de produits. Et que dire des dindons de la farce, qui sont nommés les consommateurs finaux, qu’ils soient ménages ou entreprises. Ce n’est pas d’un coup de baguette magique qu’ils pourront troquer leurs Diesels pour des véhicules vertueux. Et toutes les aides du monde auront du mal à venir à bout d’habitudes bien ancrées : les statistiques du Ministère de la Transition Ecologique, sur l’utilisation de la prime à la conversion, ne viennent-elles pas de révéler qu’en 2018, 48 % de celles-ci ont été employées pour l’acquisition d’un Diesel ? Comprenne qui peut.

 

L’Observatoire du Véhicule d’Entreprise

 

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