Sur les pavés, la pagaille !
Prenez l’exemple du forfait "mobilité durable" : le dispositif est inscrit dans le projet de Loi d’orientation des nouvelles mobilités (LOM), qui arrive en commission l’Assemblée Nationale le 14 mai prochain. Mais à quelques jours de cette discussion, cette disposition emblématique du projet de loi, qui doit permettre aux "vélotafeurs" et autres "covoitureurs" de bénéficier d’une indemnité de 400 euros par an pour leurs déplacement domicile-travail, n’est pas encore assurée de son statut. Sera-t-elle facultative (comme le prévoit la LOM) ou deviendra-t-elle obligatoire (comme le souhaite le gouvernement ?). Partenaires sociaux et employeurs ne sont bien sûr, pas sur la même longueur d’onde. Quant au gouvernement lui-même, il fait valoir par la voix de son Premier ministre que cette question est encore "en arbitrage". Un élément de langage voulant dire que les pouvoirs publics sont gênés aux entournures.
Même constat pour le développement des nouvelles micro-mobilités, qui permettent de décongestionner les grandes artères grâce à de petits engins répondant aux jolis noms de "nouveaux véhicules électriques individuels (NVEI)" ou "Engins de déplacement personnel (EDP)", mais qui peuvent se révéler redoutables pour les piétons, les jeunes enfants et les personnes âgées en particulier.
Car il faut bien se rendre à l’évidence, à force d’avoir diabolisé la voiture, d’avoir supprimé les places de parking dans les grandes villes, sans pour autant mener à temps la modernisation promise des transports en commun, les citadins ont adopté d’autres formes de déplacements.
En 2018, les ventes d’EDP ont franchi le cap de 1,6 million d’unités, notamment grâce au boom des trottinettes électriques (près de 238 000 unités). Résultat : les trottinettes, hoverboards, gyropodes et autres monoroues envahissent de plus en plus, non seulement les chaussées, mais également les trottoirs. Et c’est là que le bât blesse puisque le nombre de piétons accidentés sur la voie publique ou même tués, progresse à un rythme inquiétant depuis plusieurs mois.
Une fois de plus, les usages sont allés plus vite que la loi. Au point que la ministre des Transports, Elisabeth Borne, elle-même, n’hésite pas à parler de "développement anarchique" et de "loi de la jungle" ! L’heure est donc à la règlementation de l’utilisation de l’espace public par chacun, faute de quoi les sanctions tomberont.
Un décret va donc préciser les règles de circulation des EDP, les équipements obligatoires que devront porter leurs utilisateurs, l’âge minimal d’utilisation, l’interdiction de porter des oreillettes etc. Les trottinettes seront bientôt interdites de circuler sur les trottoirs, elles devront être poussées à la main. Et concernant leur stationnement, il sera admis sur les trottoirs à condition de ne pas gêner les piétons…
En matière de nouveaux déplacements "verts", il était grand temps de remettre "l’église au milieu du village". Pas moins d’une dizaine d’opérateurs de trottinettes électriques en libre-service (Bird, Wind, Tier, Voi, Dott…) ont investi les rues de la capitale en l’espace d’un an. La Mairie de Paris estime à plus de 15 000 le nombre de ces petits engins et en attend pas moins de 40 000 dans les prochains mois. Le succès est tel (et les nuisances allant avec) que le Conseil de Paris a pris début avril des mesures instaurant une redevance applicable à ces trottinettes électriques en libre-service et des amendes en cas de mauvais comportement sur la voie publique.
Remettre chaque mode de déplacement à sa juste place dans l’écosystème de la mobilité, est une bonne chose. A défaut d’avoir anticipé le phénomène à temps, un rattrapage est toujours bienvenu. Mais il était grand temps de construire un cadre, et de faire respecter les règles (Code de la route) à tous les usagers, cyclistes, motos et trottinettes électriques inclus.
L’Observatoire du Véhicule d’Entreprise