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Stéphane Montagnon (Holson) : "Le sujet de la réduction des coûts arrive dans les flottes"

Publié le 2 avril 2020

Par Damien Chalon
5 min de lecture
Le dirigeant de la société spécialisée dans la performance et la gestion des flottes automobiles estime que la crise actuelle va potentiellement ouvrir de nouveaux sujets dans les entreprises, à commencer par celui de la réduction des coûts.
Stéphane Montagnon (Holson) évoque la sortie de crise sur le marché des flottes.

 

Comment Holson traverse la crise actuelle ?

 

Globalement, notre activité est encore soutenue au niveau du conseil, de la gestion du changement et des questions liées à la transition énergétique. Il y a quand même une différence entre les grands groupes et les ETI, les premiers étant tout à fait matures sur le travail à distance tandis que les secondes sont très concentrées sur l’impact de la crise actuelle sur leur business, sur la réorganisation du travail… Certaines missions sont donc suspendues car nos interlocuteurs ont d’autres préoccupations. D’autres en revanche continuent comme si de rien n’était. Le ralentissement est surtout palpable pour notre activité de fleet management. Notre volume d’appels a diminué de 90 %. C’est un indicateur très clair que les véhicules ne roulent pas. Nous restons évidemment joignables pour toutes les questions administratives en cette période difficile.

 

Tous les dossiers d’avant crise restent donc d’actualité ?

 

Un élément intéressant lié à ce confinement est le changement dans les habitudes de travail. Les grèves de décembre avaient un peu préparé le terrain. Les entreprises avaient testé le télétravail et finalement, dans les grands groupes, l’activité est maintenue, nous continuons à avoir des interlocuteurs qui sont aux affaires, qui sont présents à distance. Le seul point sur lequel un coup d’arrêt est palpable sont les ateliers de travail où nous avons surtout besoin de créer une sorte d’émulation. Nous organisons même des soutenances d’appels d’offres avec des fournisseurs en visioconférence dans les domaines du vitrage et du pneumatique ainsi qu’avec les loueurs longue durée. Les acteurs du marché restent sur le pont et sont disponibles. L’écosystème est prêt à redémarrer du jour au lendemain.

 

Comment imaginez-vous la sortie de crise, que va-t-elle changer ?

 

Nous constatons déjà que le sujet de la réduction des coûts arrive dans les flottes. Nous étions partis cette année, chez la plupart de nos clients, sur une feuille de route consistant à réaliser la transition énergétique. Il faut désormais intégrer un scénario dans lequel les entreprises vont chercher à baisser leurs coûts, tout en réalisant la transition énergétique. C’est la nouveauté du moment. Les clients sont tellement en difficulté avec des annulations de commandes, avec l’absence de chiffre d’affaires pendant un mois et demi, qu’ils vont actionner des leviers pour sauver leur année. La flotte automobile reste le premier poste de frais généraux pour beaucoup d’entreprises. C’est un réflexe assez naturel de tomber dans une stratégie d’analyse des coûts et de regarder les plus gros postes. En plus, nous savons que le poste flotte automobile est souvent minimisé par les entreprises qui n’en voient pas l’intégralité car il est dispersé sur plusieurs catégories comme les loyers, les pneus, l’assurance, les cotisations patronales et l’ensemble de ce qui fait le TCO. Ce qui fait qu’elles minimisent généralement de 25 à 40 % ce poste.

 

Concrètement, en quoi va consister cette réduction des coûts ?

 

Nous allons être dans un contexte de crise économique, les politiques automobiles vont donc sûrement se contraindre un peu en termes de générosité. Les entreprises vont commencer à réfléchir sur le fait de prendre en charge le carburant, sur le changement de certaines catégories de véhicules, sur la rationalisation des marques… Nous allons assister à un gros travail en interne sur la définition du besoin. A cela va s’ajouter tout ce que nous ne voyons pas encore. Quand l’Etat va vouloir renflouer ses caisses, on peut imaginer que l’automobile, qui est toujours un sujet intéressant à ce niveau, sera impactée. Les assureurs et les loueurs longue durée vont aussi souffrir, on peut donc imaginer que tout ça fasse un drôle de cocktail où chacun va vouloir récupérer ses billes. Les clients de leur côté vont vouloir réduire leurs factures. La pression sur l’optimisation des coûts va être forte, en plus dans un cadre où il faut réaliser sa transition énergétique.

 

Réduction des coûts et transition énergétique, est-ce compatible ?

 

Le sujet de la transition énergétique est beaucoup plus profond que celui de la simple réduction des coûts. C’est un objectif global qui est en train de transformer les organisations et les modes de pensée. Je pense plutôt que cela va s’accentuer. Nous ne pouvons pas imaginer qu’une crise sanitaire telle que celle que nous vivons fasse que les valeurs fondamentales soient moins importantes que les euros. Nous allons peut-être avoir une partie des entreprises qui vont se tourner plus vers les économies mais d’autres seront encore plus exigeantes sur les aspects environnementaux. Nécessairement il faudra agir. Alors est-ce compatible ? Ce n’est pas compatible si nous ne voulons rien changer. Si nous ne sommes pas prêts à accepter des contraintes d’usage, des investissements dans des infrastructures, à changer certaines pratiques, alors la transition énergétique n’est pas compatible. Cela nécessite un effort actif. Les entreprises devront être capables de mobiliser des ressources et des capacités de changement pour réussir cette transition.

 

Pensez-vous que le marché des flottes va retrouver sa dynamique d’avant crise ?

 

Il va évidemment subir un ralentissement. Sur la catégorie des voitures particulières, il va y avoir une vraie tension sur les coûts, nous pouvons imaginer qu’il y aura des réflexions sur l’intégration de véhicules au coût moins élevé, sur le contrôle du carburant… Lors de la dernière crise sur le marché du véhicule d’occasion, il y a un peu plus de 10 ans, le premier réflexe des loueurs avait été d’allonger les contrats pour minimiser leurs pertes sur les reventes. On peut ici imaginer un tel scénario. Le premier réflexe des entreprises va être de geler les décisions d’investissement tant qu’elles n’auront pas de visibilité. Si elles peuvent prolonger les contrats, garder les voitures plus longtemps, elles vont le faire. Il faudra attendre au moins 6 mois pour que le marché retrouve son rythme. Il faut aussi avoir à l’esprit qu’il va y avoir des défaillances d’entreprises, plus de chômage… Du point de vue des constructeurs, il y a un risque fort que les commandes diminuent.

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