Stéphane Crasnier, Alphabet : "En période de crise, mieux vaut être en LLD"
Comment Alphabet s’est organisé pendant le confinement ?
Nous avons la chance d’appartenir à un groupe international, le groupe BMW, nous avions donc déjà pas mal d’expérience relative à la Chine et aux autres pays asiatiques qui avaient été touchés plus tôt que nous par le Covid-19. Nous avons pu nous inspirer des plans d’action menés localement par nos collègues. En France, cela s’est traduit par la mise en place d’un plan en trois étapes. La première, que l’on retrouve dans la plupart des entreprises, a consisté à définir un plan de continuité d’activité. Cela signifie que nous sommes passés en mode crise en analysant ce que nous pouvions faire pour sécuriser nos collaborateurs et notre business. C’est ce que nous avons réalisé au cours des deux premières semaines de crise. Ensuite, nous sommes passés à l’élaboration d’un plan de reprise, l’idée étant est de voir ce que l’on pouvait mettre en œuvre pour remettre l’activité à 100 % le jour où nous aurons l’occasion de le faire. Il y aura enfin la reprise effective, progressive, qui se déclenchera à partir du 11 mai selon les informations communiquées par le gouvernement.
Comment avez-vous accompagné vos clients ?
Sur cette partie, la première des choses à faire, avant de répondre aux clients, consistait à garantir que l’on puisse assurer la continuité de l’activité avec nos collaborateurs. En l’occurrence, nous avions déjà mis en place du télétravail à hauteur de deux jours par semaine pour ceux qui le souhaitaient, et ce depuis notre déménagement dans nos nouveaux locaux en janvier. La culture du télétravail était donc déjà très forte au sein de l’entreprise. C’est pourquoi nous avons plutôt bien surmonté cette période de confinement. Les clients ont donc eu la garantie que tous nos collaborateurs étaient en mesure de leur répondre. Une fois tout cela mis en place, nous avons communiqué auprès d’eux en leur disant que l’activité se poursuivait, que nous étions présents pour toutes les questions relatives à la gestion de leur parc automobile. On peut encore passer des commandes et servir les appels entrants lorsque cela est nécessaire. Les véhicules peuvent quant à eux être entretenus si nécessaire dans des cas d’urgence et dans le contexte légal évidemment. Tout a été mis en œuvre pour poursuivre l’activité.
Avez-vous eu des demandes particulières de la part de certains clients ?
Effectivement, certains clients, pour des raisons très spécifiques à leur activité, ont entamé des démarches pour savoir s’il y avait la possibilité d’aménager leurs paiements. C’est quelque chose que nous devons analyser au quotidien en tant que loueur. Nous évaluons la santé financière de ces clients, pour savoir dans quelle position ils se trouvent. Evidemment, il faut jouer avec les différents outils du moment. La première des choses à faire pour ces clients en difficulté est de se retourner vers leurs banques. Le gouvernement a également mis en place beaucoup de solutions pour que les entreprises se portent dans la meilleure des situations possibles. Et pour notre part, au cas par cas, nous regardons leur situation particulière, nous l’évaluons avec eux et nous leurs répondons en fonction de leur santé et de leur structure. Après, il y a eu des positions relatives aux fins de contrats. Pour les clients qui arrivent au bout de leur période de location, nous sommes mécaniquement sur une extension de contrat lorsqu’ils ne peuvent pas ou ne veulent pas restituer. Nous avons logiquement aménagé cette partie là. Et puis il va y avoir le post-confinement, il faudra alors voir avec les clients si cela a du sens de prolonger les contrats. Nous serons encore une fois sur du sur-mesure, nous allons jouer notre rôle de conseil en disant par exemple qu’il est préférable, vu leur situation, d’étendre les contrats ou non pour telle ou telle raison. Je tiens à souligner qu’il n’y a rien de systématique, tout se fait au cas par cas.
Avez-vous constaté un changement dans les pratiques des clients et est-ce que la LLD a été un produit efficace durant la crise ?
Le comportement des clients est différent selon leur typologie. Il y a tout d’abord les très grands comptes chez qui la mise en concurrence est systématique, ils challengent leurs achats. Ils vont continuer à procéder de la sorte. Ils ont par ailleurs continué à commander des voitures et à passer des appels d’offres. C’est un peu business as usual pour ces clients. On trouve ensuite les entreprises moyennes qui sont encore plus confrontées que les grands comptes à ces questions de trésorerie. Nous avons la chance, en tant que loueur longue durée, de proposer un produit qui justement permet de gérer au mieux la trésorerie. Le bien, il est chez nous, pas chez le client. C’est un argument pour nous que de mettre en avant notre produit en disant que justement, en période de crise, mieux vaut être en LLD, un produit totalement flexible, plutôt que d’être en achat ou sur d’autres solutions. Enfin, il y a les toutes petites entreprises pour qui il est difficile de standardiser un comportement. Mais, là encore, elles ont compris la flexibilité de l’outil, le fait de ne pas avoir d’engagement de trésorerie sur leur véhicule et de toujours avoir quelqu’un au bout du fil pour répondre à leurs besoins et avoir une écoute vis-à-vis de leur situation particulière.
La crise a-t-elle poussé des clients à repousser leurs projets d’électrification ?
Je ne vois pas de lien direct entre ce que l’on vit et la mobilité électrifiée. Je pense que cette mobilité est surtout liée aux incitations et aux engagements de l’Etat. Si ce dernier venait à maintenir sa position dans cette direction, je n’envisage pas de changement. S’il venait en revanche à consacrer ses efforts vers d’autres énergies, alors il y aura un effet. Dans notre rythme de commande, nous constatons une accélération très forte de l’électrifié. Il n’y a pas eu de déviation durant le confinement.
Êtes-vous favorable à des mesures de soutien du marché automobile, histoire de relancer la machine au plus vite ?
Il y a beaucoup d’acteurs dans l’industrie automobile et l’Etat a déjà offert beaucoup de solutions pour les soutenir. Parmi les principaux acteurs du marché on trouve les réseaux de distribution, ils sont déterminants car ils garantissent la maintenance des véhicules utilisés par nos clients. Là où je suis favorable à une mesure de soutien, ce serait pour aider cette chaîne de distribution car elle est le cœur de notre activité. Ce sont nos fournisseurs, nos partenaires, c’est avec eux que nous vivons. Ce sont les acteurs les plus importants du milieu automobile. Ensuite, côté constructeurs, certains ont levé la main pour avoir des aides de l’Etat, d’autres ne l’ont pas fait. Enfin, pour la location longue durée, Alphabet n’a pas de demande particulière. Nous nous voyons comme un acteur qui va proposer des solutions post confinement, nous avons tout à gagner avec la sortie de la crise. Il va devenir évident que la LLD est la solution idéale pour flexibiliser la mobilité et mieux gérer les actifs.
Vous êtes confiants sur une reprise forte de votre activité ?
Je ne pense pas que nous allons rattraper l’intégralité des commandes qui auraient dû être passées durant le confinement. Néanmoins, je suis confiant sur une reprise dynamique même s’il faudra être attentif à certains éléments, notamment la santé du marché des véhicules d’occasion et celle de nos clients. Et puis comme je l’ai dit auparavant, nous avons des solutions pour étendre certains contrats.
Justement, concernant le marché VO, certaines alertes commencent à poindre…
Nous avons continué à vendre des VO pendant la crise à des prix qui étaient très bons. Peut-être parce que tous les acteurs n’étaient pas en mesure d’offrir du VO. Ce que nous constatons est que les prix se tiennent. Néanmoins, nous avons certains pays comme la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne où le marché VO commence à tomber fortement. En France, nous n’avons pas encore de statistiques, je ne pourrai donc pas vous apporter de réponse globale fiable. Nous avons un risque, c’est une évidence. Maintenant, nous nous sommes prémunis de ce risque, nous nous sommes protégés en préparant l’entreprise face à cette potentialité. Je pense que le marché devrait avoir quelques soubresauts.
Anticipez-vous un gros pic d’activité à compter du 11 mai avec toutes les livraisons et restitutions par exemple qui n’ont pas pu se faire ?
Nous allons dédier des ressources complémentaires pour gérer la reprise, ce sont des ressources que nous avons en interne. Mais nous avons besoin de partenaires autour de nous pour comme les experts en restitution, les garages, les transporteurs… Il faudra du temps pour que toute la machine se remette en place. Nous sommes confiants sur le fait de revenir à la normale très rapidement sur les livraisons. C’est vrai que les clients sont très en demande d’être livrés. Pour vous donner un ordre d’idée, nous livrons en temps normal environ 2500 véhicules par mois. Cela donne une idée de la réaccélération qui va avoir lieu par la suite.
Certains acteurs comme Macadam ont annoncé des mesures fortes en vue de la reprise. Etes-vous sur la même longueur d’ondes ?
Nous allons voir cela avec Macadam, nous sommes en discussion avec eux sur le sujet. Il faut que ce soit robuste comme mesure pour le client et pour nous. Il faudra forcément des solutions qui nous rendent plus flexibles. Nous avons par exemple fortement accéléré sur le digital pendant la phase de confinement pour aller plus vite dans certains process.
Avez-vous enfin pris part à l'élan de générosité auquel ont pris part d'autres acteurs de la LLD?
Oui, mais je ne tiens pas en faire l'écho. Les structures concernées pourront en parler si elles le souhaitent. Je voudrais en revanche en profiter pour remercier tous nos collaborateurs et tous nos partenaires. Nous avons senti une énorme vague de solidarité et beaucoup d’humanité durant cette période de confinement. Grâce à cela, tout s’est bien passé. Je tiens donc à remercier tout le monde.