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Gare à la fracture électrique

Publié le 6 février 2020

Par Arval Mobility Observatory
4 min de lecture
Zoom de l’Arval Mobility Observatory - On connaissait la fracture sociale, la fracture numérique, la fracture sanitaire, la fracture immobilière… La liste est longue. Voici qu’une nouvelle fracture se dessine, cette fois dans l’automobile.

 

En décembre, l’Observatoire Cetelem avait déjà abordé cette question à travers sa dernière étude où l’on découvrait que la voiture est toujours un outil indispensable et vital pour près de 4 Français sur 10 (principalement des ruraux et des seniors), là où ailleurs, essentiellement chez les jeunes urbains, elle rime avec pollution, embouteillages, nuisances sonores. Derrière ces chiffres, c’est tout simplement une fracture qui se dessine entre ceux qui ont accès à des transports en commun et qui peuvent donc se passer d’un véhicule, et ceux qui n’en bénéficient pas et qui doivent donc impérativement avoir un (voire deux) véhicules. Un phénomène pas si anodin que cela si l’on se rappelle de l’origine du combat des gilets jaunes de l’hiver 2018 (la hausse des prix des carburants) et si l’on constate que les kilométrages moyens parcourus par un véhicule ne diminuent plus depuis quelques années.

 

Avec l’essor du véhicule électrique, annoncé dans un bel unanimisme, comme la panacée aux problèmes de réchauffement climatique et de pollution, une autre fracture automobile pourrait bel et bien apparaître. Au risque de ralentir (empêcher ?) le développement annoncé de ce véhicule vertueux. L’Observatoire Cetelem, encore lui, ne disait-il pas dès 2018 que la voiture électrique était « parfaite… sur le papier » mais que plusieurs points de blocage l’handicapaient aux yeux des Français ?

 

Deux ans après, ces points de blocage n’ont pas (ou peu) évolué. Et d’autres sont apparus. Dans une étude publiée en décembre dernier, l’institut JATO Dynamics révélait ainsi que, contrairement à une idée reçue, le véhicule électrique coûte de plus en plus cher. En Europe, par exemple, son prix moyen a augmenté de 42 % depuis 2011. La plupart des modèles populaires sur le marché (Renault Zoé, Nissan Leaf...) ont tous augmenté leur prix. Raison invoquée ? L’autonomie. Les constructeurs ont amélioré les batteries et ajouté au passage des équipements de sécurité et de confort. Du coup, le véhicule électrique n’a pas échappé pas à l’augmentation généralisée du prix des voitures.

 

Si l’offre produits augmente considérablement, on observe toutefois un marché scindé en deux. Et c’est là qu’apparait le risque de fracture électrique. Car il y aura d’un côté des véhicules haut de gamme, voire très haut de gamme (Tesla, Audi e-tron, Mercedes EQC, Jaguar i-Pace) et de l’autre des modèles compacts, certes plus abordables (Renault Zoé, Nissan Leaf, BMW i3, Hyundai Kona…), mais qui n’auront pas tous droit aux mêmes avantages.

 

Ainsi, la recharge ultra-rapide à 150, voire 350 KW proposée par le réseau Ionity (400 bornes en Europe d’ici la fin de l’année) va coûter cher pour les modèles autres que ceux qui ont financé l’installation de ces « super chargeurs ». En dehors des marques Audi, BMW, Ford, Mercedes, Porsche et Volkswagen, sans oublier Hyundai et Kia qui ont rejoint le club et qui bénéficient de tarifs plus avantageux, le prix fixé est depuis le 31 janvier de 0,79€ kWh. Et cela n’est pas neutre. Alors que la session de recharge était initialement prévue à un tarif unique de 8 euros, un « plein » coûte désormais selon la capacité de la batterie (60 à 100 kWh), entre 47 et 79 €. On n’est pas loin du prix d’un plein de carburant !

 

Gare donc, à ne pas proposer un véhicule électrique à deux vitesses avec d’un côté, des modèles bénéficiant de tarifs de recharge plus avantageux et d’un accès privilégié aux bornes ultra-rapides, et de l’autre, des véhicules qui devront se contenter d’une recharge lente, accélérée ou rapide, mais limitée. C’est l’équation économique « du véhicule électrique doté d’une petite batterie, synonyme de petit prix, mais de recharges fréquentes » qui est en jeu. La bataille du véhicule électrique ne réussira pas sur les seules injonctions politiques, mais passera avant tout par la preuve de l’efficacité, autrement dit l’optimisation du coût d’usage. Et pour reprendre une formule à la mode, on est encore loin du « véhicule électrique pour tous ».

 

L’Arval Mobility Observatory

 

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