Énergies renouvelables : le départ est donné mais la course reste longue
Eoliennes et panneaux photovoltaïques font briller les yeux des investisseurs et des boursicoteurs à l’affût des rendements, sans (trop) de risques. Inimaginable il y a encore quelques mois, les parcs estampillés "énergies renouvelables" sont devenus des classes d’actifs à part entière, au même titre que les aéroports ou les concessions autoroutières, que s’arrachent les gérants.
Sur le terrain, les grandes manœuvres sont aussi au rendez-vous. Depuis le début de l’année, Total multiplie les investissements (voir Le Zoom de l’Arval Mobility Observatory du 14 Janvier). En l’espace de dix jours, il a conclu pas moins de quatre accords dans le domaine (hydrogène, bio méthane, solaire) aux quatre coins de la planète. Dernier en date, un investissement de 2,5 milliards de dollars en Inde pour prendre 20 % de la société AGEL, un spécialiste des centrales photovoltaïques. L’Inde représente un marché colossal pour les renouvelables puisque New Delhi entend construire 450 GW de capacités renouvelables d’ici 2030, ce qui lui permettra aussi de réduire sa dépendance au charbon.
Car en Inde, comme dans plusieurs grandes économies mondiales, la houille joue encore un rôle prédominant. Au pays des Maharadjas, elle emploie toujours 350 000 personnes et représente 60 % de l’électricité nationale. Même constat en Chine (qui a pourtant annoncé en septembre dernier son objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2060), mais où de nouvelles centrales sont construites. "Pendant les six premiers mois de l'année 2020, les provinces chinoises ont accordé des permis pour près de 20 GW de nouvelles capacités", rappelait cet été le quotidien Les Echos (1). Des décisions à contre-courant de ce qui s’observe ailleurs dans le monde mais qui, compte tenu de la place prépondérante de l’économie chinoise sur la scène internationale, font peser de lourdes menaces sur le climat.
A cet égard, les derniers chiffres sur l’économie chinoise ne sont pas pour rassurer les défenseurs de la lutte contre le réchauffement climatique. L’Empire du Milieu, d’où est partie l’épidémie de Coronavirus qui a mis l’économie mondiale à terre, est aujourd’hui le seul pays à afficher un taux de croissance positif (+2,3 %). Même si ce résultat est le plus faible depuis la fin du règne de Mao (1976), il fait meilleure figure que les taux négatifs affichés en Europe et Outre-Atlantique. Pas sûr dès lors, que les grandes économies occidentales soient à même de contraindre Pékin à s’acheter enfin une conduite sur le plan écologique et à abandonner la houille (elle représente 60 % des besoins en énergie primaire en Chine).
Malgré cela, le "grand bond en avant" des énergies renouvelables n’est sans doute pas prêt de ralentir. Surtout dès lors que, comme il l’a promis durant sa campagne électorale, le 46ème locataire de la Maison Blanche, Joe Biden, a réintégré les Etats-Unis dans le club des pays signataires de l’Accord de Paris.
Nul doute alors que les milliards programmés par les fleurons tricolores de l’énergie – 3 milliards de dollars par an chez EDF, 3,5 milliards chez Engie et entre 2 et 3 milliards de dollars chez Total - dans les EnR (2) seront bienvenus pour rester dans la course aux nouvelles capacités de GW. Et espérer ainsi se faire une petite place au soleil de ce nouvel Eldorado.
L’Arval Mobility Observatory
(1) « Centrales à charbon : un recul inédit, sauf en Chine ». Les Echos, 3 août 2020
(2) « La grande course de Total, Engie et EDF dans les renouvelables ». Le Figaro 19 janvier 2021.