Energies alternatives : vous avez dit voiture propre ?
Accélération de la transition énergétique, disparition des moteurs thermiques, développement de la voiture électrique… Jamais les questions de protection de l’environnement, de lutte contre le réchauffement climatique ou de préservation de la santé publique n’ont été aussi prégnantes dans l’actualité et dans l’action publique. Au risque, parfois, de soulever l’hostilité populaire, lorsqu’une mesure est incomprise du grand public, comme vient de nous le rappeler la colère des gilets jaunes et le recul de l’exécutif sur la hausse de la taxe carbone.
Appliquée à l’automobile, cette course aux énergies propres débouche quelquefois sur des résultats contraires à ce qui était programmé. Prenons le cas de la diversité énergétique : la guerre ouverte contre les voitures diesel, sans considération aucune sur leur date de mise à la route, a logiquement produit ses effets avec un effondrement des ventes, tant en France qu’en Europe. Priés de changer leurs habitudes du tout au tout (et fortement incités par la fiscalité), les consommateurs ont opté pour d’autres énergies, telles que l’essence. Problème, ces motorisations essence (qui représentent désormais un quart des VP immatriculés dans les entreprises), sont peut-être meilleures pour la lutte contre les particules fines, mais pas contre le réchauffement climatique.
Plus de véhicules essence sur les routes signifie plus d’émissions de CO2, donc un danger pour le réchauffement de la planète. Depuis deux ans, ces émissions de CO2 sont reparties à la hausse en Europe, vient d’avertir Carlos Tavares, le patron de l’ACEA (Association européenne des constructeurs automobiles) et n°1 de PSA. Rien qu’en France, elles sont remontées en moyenne à 112g/km.
Un beau caillou dans la chaussure des constructeurs. Pour respecter les règles européennes, ils doivent afficher d’ici deux ans des émissions moyennes de CO2 de 95 g par km parcouru ; faute de quoi les amendes pleuvront (la note pourrait atteindre plusieurs milliards d’euros). L’engouement des consommateurs pour l’essence n’arrange pas leurs affaires et éloigne l’atteinte de leurs objectifs. Carlos Tavares a bien tenté une explication à cette situation en soulignant que le recul du diesel aurait dû se faire en faveur de l’électrique ou l’hybride rechargeable et non de l’essence, si toutefois l’offre était disponible.
Mais si tel avait été le cas, d’autres problèmes auraient pu surgir, au premier rang desquels la disponibilité en électricité pour recharger les véhicules. A cet égard, les dernières statistiques sur le développement du charbon à l’échelle planétaire, ne sont pas pour rassurer. « Sale temps pour la planète », estime d’ailleurs cette semaine une belle enquête du Figaro, en rappelant que la consommation de charbon pour la production d’électricité continue d’augmenter dans le monde. Rien qu’en Chine, « l’équivalent d’une tranche supplémentaire de 500 MW, soit la puissance d’un demi-réacteur de Fessenheim, serait ainsi mis en service chaque semaine », écrit encore le quotidien. Obligés pour satisfaire leurs besoins énergétiques, une vingtaine de pays d’Afrique, d’Amérique centrale, d’Asie et du Moyen-Orient, développent l’exploitation du charbon.
Pas facile, dans ces conditions, de rêver à des flottes entières de voitures électriques, réputées vertueuses pour leur absence d’émissions de CO2 et autres polluants… mais alimentées par de l’électricité produite à partir de charbon, faute d’électricité d’origine nucléaire, solaire, éolienne ou marémotrice en quantité suffisante.
Morale de l’histoire ? Bien malin celui qui détient la véritable recette du véhicule propre. Mais l’actualité risque de rappeler chacun à ses responsabilités : dans l’Antarctique occidental, un glacier grand comme la Floride ou un quart de la France, menace de se détacher et de provoquer une hausse inédite du niveau des mers. Alors, essence ou électrique ? Seule certitude : la véritable énergie vertueuse est celle qu’on a économisée.
L’Observatoire du Véhicule d’Entreprise