Electrique : les 100 000 bornes maintenant ou jamais !
2020, année électrique aurait chanté le duo Gainsbourg-Birkin ? Sans aucun doute si l’on en juge par la consécration de Tesla en Bourse (le groupe californien a intégré fin décembre le prestigieux S&P 500 à Wall Street), l’envolée des ventes de véhicules électriques ou électrifiés un peu partout dans le monde (elles représentent plus de la moitié des immatriculations en Norvège et ont triplé en France pour passer le cap des 10 % du marché national).
L’appétit venant en mangeant comme dit le proverbe, les consommateurs jusqu’alors rétifs à cette motorisation, l’essayent puis l’adoptent, moitié-contraints par un environnement règlementaire de plus en plus défavorable au thermique, moitié-séduits par les performances de ces nouveaux modèles et les généreux avantages fiscaux que la puissance publique leur alloue.
Si l’essai a bel et bien été marqué pour l’électrique et l’hybride l’année dernière, il faut désormais le transformer. Côté constructeurs, il n’y a pas trop de soucis à se faire ; la pression de Bruxelles sur la réduction de leurs émissions de CO2 n’est pas près de se lever et ils vont donc poursuivre le lancement de nouvelles gammes. Côté consommateurs-conducteurs en revanche, des questions restent en suspens : la réduction des subventions à l’achat prévue en juillet prochain risque-t-elle de freiner leurs ardeurs ? Quid également de la très (trop) lente montée en charge du réseau de recharges publiques ?
Nous sommes à 11 mois de l’échéance fixée par l’exécutif pour atteindre le seuil des 100 000 points dans l’hexagone et il faut encore tripler le parc existant (30 000 environ) ! Selon le dernier baromètre du spécialiste des solutions de recharge EVBox, 42 % seulement des utilisateurs français de véhicules électriques pensent qu'ils seront en mesure de recharger durant leur trajet. En Allemagne et aux Pays-Bas, ils sont 60 et 52 % à être de cet avis. La peur de la panne de courant (à défaut de la panne sèche) guette donc toujours au tournant l’automobiliste français.
Au-delà de la question du réseau de 100 000 bornes ou du déploiement massif de points de charge dans le domaine privé, se pose aussi la question de l’emplacement des équipements aux bons endroits, avec la bonne charge et surtout, une politique tarifaire claire (à la minute, au kilowattheure, au forfait, gratuit). Dans ce domaine, il y a clairement des progrès à faire. Pour reprendre les experts du cabinet Sia-Partners cités dans Les Echos (1), "l’électro-automobiliste doit faire face aujourd'hui à « une jungle tarifaire qui peut freiner les usages". Gare donc à ne pas décourager les meilleures volontés du monde avec des solutions trop compliquées, incompatibles entre elles, dans lesquelles le consommateur aura l’impression de s’être fait duper.
Les précédents observés dans les forfaits téléphoniques ou internet devraient à ce titre servir de leçon aux opérateurs. En matière de stratégie électrique, comme en matière de stratégie vaccinale, il faut se hâter lentement mais sûrement, en communiquant clairement les actions, les objectifs et des calendriers qui seront tenus. C’est à cette condition seulement que, dans un cas on réussira le pari de la voiture électrique en France et que, dans l’autre, on relancera une économie nationale brisée par dix mois de « stop & go » sanitaires.
L’Arval Mobility Observatory
(1). Voiture électrique : la France accélère le déploiement des bornes de recharge. Les Echos. 23 octobre 2020.