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Antoine Repussard, Zenride : "Le vélo sera une norme en entreprise"

Publié le 6 mai 2021

Par Jean-Baptiste Kapela
8 min de lecture
Zenride a été fondée en 2018 par Antoine Repussard et Thomas Beaurain. Pionnière dans le vélo de fonction, la start-up a commencé à commercialiser son offre en 2019 et travaille aujourd’hui avec 70 clients. Interview de l’un des fondateurs, Antoine Repussard.
Antoine Repussard, cofondateur de Zenride.

 

JDF : Comment vous est venue l’idée des vélos de fonction ?

A.R. : Cette idée est née de notre expérience de mobilité en tant que salariés. Nous n’avons pas accès à la voiture de fonction, et nous n’apprécions pas nos trajets en transports en commun ou en scooter. Nous nous sommes donc orientés vers le vélo, mais nous nous sommes rendu compte que cela coûtait cher. Nous nous sommes donc demandés comment notre entreprise pouvait nous accompagner dans notre démarche. Or l'offre n’existait pas en France. L’idée nous est venue de là. Nous avons voulu avec mon associé, Thomas Beaurain, rendre accessible au plus grand nombre ce moyen de transport pour que les entreprises puissent permettre à leurs salariés, financièrement, d’effectuer leur transition vers ce moyen de mobilité.

 

Vous disposez aujourd'hui d'un portefeuille de 70 entreprises pour 600 utilisateurs. Vous attendiez-vous à avoir autant de clients ?

Non, nous ne pensions pas en avoir autant à la fin de l’année. En 2020, avec la crise du Covid, nous avons eu un énorme coup d'accélérateur, en passant de 10 à 60 clients. On savait qu’il y avait un intérêt et que c’était dans l’air du temps. Je pense que ça va le rester pour de nombreuses années, comme c’est le cas pour la voiture de fonction.

 

Parmi vos clients, figurent de grosses entreprises comme Microsoft ou encore Veolia, ont-elles été difficiles à convaincre ?

Je ne dirais pas que ces entreprises ont été difficiles à convaincre, car toutes les sociétés qui font appel à nos services, sont assez "motrices". Pour certaines d’entre elles, ce n’est pas évident de se lancer dans une nouvelle forme de mobilité. Quand les grandes sociétés y vont, c’est qu'elles sont assez moteur dans leur secteur et dans l’innovation. Après, comme ce sont des grosses structures, cela a pris plus de temps car il y a plus de salariés à convaincre. Ce sont des sociétés qui font quand même attention au bien-être de leurs collaborateurs et qui ont des enjeux environnementaux importants. L’avantage du service Zenride, c’est qu’il permet d’associer les deux : l’amélioration du quotidien des salariés, tout en ayant un impact sur l’environnement.

 

Comment s’est illustré l’impact de la crise sanitaire sur vos activités ?

Jusqu’à 50 entreprises nous contactaient par semaine pour avoir des informations sur le service Zenride. Parce qu’elles cherchaient un moyen de mobilité pour leurs collaborateurs qui voulaient concilier à la fois distance sociale, praticité et santé. Le moyen de transport qui permet de concilier ces trois-là, c’est le vélo.

 

Vous avez affiché une progression de 500 % de votre chiffre d'affaires par rapport à 2019. Pensez-vous pouvoir tenir cette cadence?

Nous nous attendons à revenir à une rythme plus "normal". Forcément, quand les gens ne travaillent plus au bureau, le besoin d’un vélo s’amoindrit. Il y a des entreprises qui ne fonctionnent qu’en télétravail depuis un an. Logiquement, elles ne comptent pas déployer notre service dans ces conditions. Le retour à la normale nous permettrait de conserver une belle croissance et d’aller de l’avant. Je ne sais pas si on refera 500 % cette année, mais nous espérons garder cette belle dynamique. Mais de plus en plus de grands groupes s’intéressent à ce mode de transport. Ils seront de plus en plus enclins à déployer des vélos.

 

Une sortie de crise serait-elle réellement profitable pour votre société ?

Avec la Covid-19, il y a eu deux effets dans le secteur du vélo. Lors du déconfinement, au mois de mai 2020, où les salariés ne voulaient pas retourner dans les transports, il y a eu un effet très positif sur le secteur du vélo. En revanche, dès l’automne, on a commencé à revenir à des situations de télétravail assez importantes. Les gens n’allaient plus forcément au bureau et l’effet de la crise a été négatif pour notre marché. On fera beaucoup plus de volume une fois que cette période sera finie, c’est sûr.

 

Quel est le modèle économique de Zenride ?

Nous avons un modèle très spécifique chez Zenride. Malgré la concurrence qui est née sur le marché du vélo de fonction, nous sommes les seuls à travailler sur ce modèle. Nous avons noué des partenariats avec des magasins de vélos. Aujourd’hui, nous disposons d'environ 70 partenaires chez qui les collaborateurs vont choisir le modèle souhaité et selon le budget défini par leur entreprise. Que ce soit de l’électrique, du classique, du vélo pliant, du vélo cargo. Chaque salarié choisit le modèle qui correspond à son usage. Ensuite, nous achetons les vélos que nous mettons en location en entreprise. Nous touchons un revenu sur la location et la mise à disposition des services. Des suppléments sur l’entretien ou l’assurance sont également proposés. Nous mettons aussi à disposition un outil de gestion de flotte où les fonctionnalités de cet outil sont payantes.

 

Comment vous démarquez-vous de la concurrence sur le secteur ?

Nous nous démarquons dans l’expérience collaborateur. Pour nous, il est primordial d’avoir un large choix, parce que chaque personne a un besoin différent vis-à-vis du vélo. Il y en a pour qui c’est du sport, d’autre un moyen transport, il y en a qui ont des enfants... Que chaque salarié se retrouve avec son modèle et l’équipement qui lui est adapté. Nous proposons plus de 300 vélos parmi plus de 50 marques, que les salariés peuvent essayer. Voir un vélo c’est bien, mais pouvoir le tester et se faire conseiller c’est mieux. Le fait de travailler avec notre réseau de magasins partenaires, main dans la main avec des professionnels, c’est notre spécificité. Des passionnés qui peuvent recommander un bon modèle adapté à nos clients. Enfin, nous mettons un point d’honneur sur la réactivité et la disponibilité. Un collaborateur qui veut un vélo et qui choisit son modèle en mars, ne souhaite pas le récupérer au mois de juillet. Ils vont en magasin, ils choisissent le vélo, puis trois ou quatre jours plus tard, il est à eux. On met le salarié au cœur de l’expérience. Plus que le modèle économique, c’est surtout le modèle opérationnel qui diffère de nos concurrents.

 

Avez-vous des soutiens financiers ? Des personnalités ou des entreprises sont-t-elles derrière vous ?

Nous avons des Business Angels qui nous accompagnent par leur expérience et financièrement. Certains sont assez influents dans le secteur de la mobilité. Parmi eux, Didier Kuhn, l’un des premiers investisseurs de Blablacar et Drive in, Jean-Fabrice Mathieu qui est l’homme qui a monté SeLoger.com, Justin Ziegler et Olivier Mathiot, les fondateurs de PriceMinister.

 

Allez-vous vous ouvrir à d’autres moyens de mobilité durable ? Comme le scooter électrique ou la trottinette ?

Nous y avons pensé, mais on ne l’envisage pas… En tout cas, pas à court terme. La trottinette électrique reste plutôt accessible en termes de prix par rapport au vélo. À 500 euros, on peut en avoir une de qualité, tandis qu’un vélo, c’est 800 euros à 1 000 euros pour un modèle classique et 2 000 euros pour une bonne marque. Notre intérêt, c’est la promesse de rendre accessible un bon vélo, à tout le monde, ce qui est, de ce fait, moins pertinent pour une trottinette. Cette dernière est intéressante pour de la micromobilité, 2-3 km, mais rarement plus. Concernant le vélo, il y a une multitude de cyclistes qui font 15 km, matin et soir. Et pour le scooter, ce n’est pas un véhicule vers lequel on veut se tourner, car moins efficace qu’un vélo. Avec toutes les pistes cyclables, il y a plein de voies qui sont adaptées aux cyclistes et pour le stationner, c’est plus simple et gratuit.

 

Les vélos de fonction se développent-ils à l’étranger, ou est-ce une exception française ?

Le business est assez développé en Allemagne et en Belgique. Ces deux pays ont un contexte fiscal qui est très différent du nôtre, mais le concept est là. Au lancement de Zenride, des acteurs en Allemagne existaient depuis 8 ou 9 ans, où des milliers d’entreprises le proposent . Le vélo y est cinq fois plus développé.

 

Vous espérez convertir 150 entreprises au vélo de fonction, est-ce un objectif réalisable ?

Avec la mise en avant de l’importance de la santé dans le quotidien, les salariés ne vont pas retourner dans les transports en commun comme avant, même en sortie de crise sanitaire. Je pense que les entreprises ne vont pas fermer la porte à un service comme le nôtre, au contraire. Zenride répond à un réel besoin de leurs collaborateurs.

 

Comment voyez-vous l’évolution du vélo de fonction dans quelques années ?

Je pense que le vélo sera une norme en entreprise, au même titre que le remboursement des transports en commun. Il sera systématiquement proposé par les sociétés car il y a un vrai besoin des salariés et le coût n'est pas très important pour une entreprise. Ça participe aussi à l’effort de l’entreprise de réduire le coût de l’empreinte carbone de ses salariés.

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