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Petites flottes : la LLD ne fait pas recette

Publié le 28 mars 2013

Par Axel Abadie
7 min de lecture
Au sein des TPE et des PME, les habitudes financières en matière de flotte automobile ont la vie dure. La location avec option d’achat, ou l’achat, comptant ou à crédit, satisfont majoritairement ces entreprises. A l’inverse, la location longue durée ne convainc que 14 % d’entre elles. Etat des lieux.
Au sein des TPE et des PME, les habitudes financières en matière de flotte automobile ont la vie dure. La location avec option d’achat, ou l’achat, comptant ou à crédit, satisfont majoritairement ces entreprises. A l’inverse, la location longue durée ne convainc que 14 % d’entre elles. Etat des lieux.

Besoins en maintenance, assistance, pneumatiques, véhicules de remplacement ou assurance perte financière : ce sont les services principaux souscrits par les entreprises dont la flotte ne dépasse pas les 10 véhicules. Ces résultats émanent d’une enquête comportementale réalisée par le Syndicat national des loueurs de voitures en longue durée (SNLVLD). Afin de comprendre la chaîne de décision au sein de ces entreprises, le syndicat a mené une étude auprès de 400 décideurs, 400 gestionnaires et 400 utilisateurs. Il en ressort que, pour ces flottes de moins de 10 véhicules, les besoins principaux en services sont similaires à ceux des grands groupes, convertis, eux, à plus de 80 % à la location longue durée (LLD). Cela dit, seulement 14 % des TPE et PME ont recours à ce mode de financement.

Selon Philippe Brendel, président de l’Observatoire du véhicule d’entreprise (OVE), “le problème est que les TPE ne raisonnent pas en coût d’usage. Sur les VP, il y a des coûts fiscaux, c’est quelque chose qu’il faut intégrer. Dans le calcul du coût de revient kilométrique, une entreprise doit tenir compte de toute la fiscalité. Cela peut représenter de 20 à 30 % du coût total d’utilisation”. Face à cette difficulté, il faut, selon lui, une approche rationnelle. “Il faut aller voir l’artisan et lui expliquer ce qu’est le coût total de possession, ce fameux TCO. En faisant cela, on prend le risque de le rebuter. Il faut donc avoir une approche marketing simple et ficelée, disant “Votre VU pour X euros tout compris”. C’est une chose simple qui montre le vrai coût”, préconise-t-il.

Contourner les habitudes

Une des particularités de ces entreprises, qui rend le travail des professionnels de la vente aux entreprises difficile, c’est l’interlocuteur unique, le patron de la société, qui est également directeur financier, et gestionnaire de flotte. Pour Laurent Corbellini, président de la commission communication du SNLVLD, même s’il le comprend bien, “l’interlocuteur unique n’a pas beaucoup de temps à consacrer à cela. En termes de conseil, difficile de dire si ces personnes sont accompagnées. On sait cependant que les petites entreprises sont conseillées par leur expert-comptable”. Même appréciation du côté de l’OVE, où Philippe Brendel, après des formations auprès de comptables, juge “qu’ils se rendent compte que la LLD peut avoir des avantages. Mais si cet expert-comptable n’est pas votre complice, il dira inévitablement à son client qu’il vaut mieux prendre une LOA”.

Quel que soit le mode de financement à mettre en avant, il faut faire montre de beaucoup de pédagogie afin de contourner les habitudes. “Ce sont des interlocuteurs longs à convaincre. Il faut tout expliquer, le pourquoi des choses, et ce n’est pas naturel pour eux. Les gens vous répondent qu’ils prennent un crédit parce qu’ils ont toujours fait comme cela”, regrette ensuite le président de l’OVE.

Le choix de l’acquisition

La société Morbihan Chauffage Service (MCS), outre trois porteurs DAF, dispose de deux Citroën C3 en propre. L’une est attribuée, l’autre à disposition de plusieurs personnes. Thierry Le Moignic, responsable logistique au sein de l’entreprise, explique que “MCS s’est intéressée aux autres modes de financement de ses véhicules de société, mais que le choix s’est porté sur l’acquisition pour des raisons de coûts. Nous avons une petite flotte, la location longue durée a assez peu d’intérêt”, assure-t-il. Même son de cloche chez Ambus. Dominique Mignon, responsable du service clients, indique que sa flotte compte 64 véhicules, dont une majorité de VUL, et qu’il s’agit d’achat comptant et non de leasing. “Nous sommes sur une flotte composée uniquement de motorisations Diesel, et chaque véhicule contient une carte carburant. Nous faisons en fonction du mode opératoire déterminé au niveau du groupe”, indique-t-il. Elle ajoute que chacun des conducteurs reçoit à son arrivée un livre intitulé “Je roule tranquille”, afin de le familiariser à l’éco-conduite et à la sécurité au volant.

La même logique de possession se retrouve chez la Sarl Hueso. Julien Hueso, cogérant, détaille sa flotte : “Nous disposons de deux véhicules utilitaires, que nous avons achetés à crédit, et d’un VP, sous forme de location sur trois ans auprès de notre concessionnaire.” Pour les deux VUL, ce sont donc des véhicules que la société souhaite conserver quand ils seront payés. La raison de ce mode de financement : les taux étaient intéressants au moment où ils ont pris leur décision. “Concernant la LLD et ses services associés, nous avions regardé, et cela ne nous a pas semblé intéressant. Ce que l’on pourrait payer en plus chaque mois se révèle plus cher qu’une révision annuelle”, explique-t-il, avant de concéder que cela lui a aussi été déconseillé par le concessionnaire.

C’est dans le témoignage de Siga Cissoko, assistante de direction chez Protertia, que l’on retrouve un choix exclusivement tourné vers la LLD. Les sept véhicules que compte la flotte de cette entreprise proviennent de deux loueurs différents. “Nous contractons en général des durées de 36 mois, où tout est compris dans le contrat, hormis l’assurance. Pour l’instant, la flotte ne va pas s’agrandir, mais nous venons de renouveler nos contrats”, fait savoir Siga Cissoko.

Solution à portée de main

Selon Philippe Brendel, les sociétés de LLD ont encore un gros travail de conviction à faire. “Il faut tenter de faire raisonner ces petites entreprises en LLD, c’est-à-dire non plus en propriétaire, mais en utilisateur de service, où on loue un usage contre un loyer mensuel. Et concernant la location de voiture auprès des particuliers, c’est la même situation. C’est pourtant l’un des seuls biens dont nous savons que la valeur atteindra zéro !”, analyse-t-il. Il y a, également, un travail sur l’approche commerciale. “Il est structurellement plus facile pour les loueurs longue durée, filiales de banques ou de constructeurs, de s’attaquer aux grands groupes. En ce qui concerne les petites entreprises, il n’est pas possible de s’y prendre de la même façon. Envoyer un commercial pour une voiture, ce n’est pas envisageable”, regrette-t-il. Et il y a, dans le camp opposé, les réticences. Le président de l’OVE rapporte que des inquiétudes se font sentir lors de réunions auprès de professions libérales, notamment la peur de rendre le véhicule en mauvais état, ainsi que les indemnités de remboursement anticipé, pour revenir à des notions purement financières.

Selon l’enquête menée par le SNLVLD, 86 % des flottes de moins de 10 véhicules ont recours à la LLD pour maîtriser leur budget. Seulement 61 % pour le prix, quand ce motif grimpe à 79 % pour les décisionnaires de flottes de plus de 10 véhicules. N’y a-t-il pas, entre la possession et l’engagement sur 36 mois et plus un juste milieu ? La location moyenne durée (LMD) peut s’avérer être la bonne solution. Philippe Brendel préconise cependant de procéder à une étude des besoins. “Est-ce que j’ai besoin d’un véhicule ? Pourquoi ? Pour un CDD de quelques mois qui arrive ou pour un poste permanent ? Les réponses sont différentes, et les offres aussi”, assure-t-il. Toute entreprise a à sa portée la formule adéquate, à l’image de l’arrivée de la LMD sur du VO : un loyer plus faible et une décote moindre à payer. La solution est à portée de main, encore faut-il avoir le temps de la chercher.

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Si les gestionnaires de petites flottes indiquent regarder ce qui se fait du côté des véhicules électriques et hybrides, le prix, l’offre encore naissante et le manque d’infrastructures apparaissent comme des freins à l’investissement. Selon Laurent Corbellini, président de la commission communication du SNLVLD, “il y a aujourd’hui une incohérence sur l’autonomie de ces véhicules pour les profils de rouleurs. Sur les prix aussi, même si on voit des formules intéressantes”. Ainsi, si des acquisitions de VE sont évoquées, le pas semble difficile à franchir. C’est ce qu’explique Thierry Le Moignic, responsable logistique chez Morbihan Chauffage Sanitaire : “La direction a parlé d’acheter un véhicule électrique, mais le fait qu’il n’y ait pas assez de bornes de recharge nous pousse à réfléchir davantage.”
 

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