La plus grande flotte de France entame sa mutation
...dans les cartons depuis plus de deux ans, le gouvernement en a fait l'annonce au début du mois de décembre : l'Etat s'apprête à repenser son rapport à la gestion de son parc automobile. Objectif : réaliser 20 % d'économie et abaisser les émissions de CO2 globales de ses véhicules de plus de 20 %. Des véhicules plus petits, moins consommateurs, plus propres et surtout plus adaptés aux réels besoins des agents de l'Etat, notamment dans les grandes villes. Priorité sera ainsi donnée à des véhicules de type Renault Modus ou Citroën C1. Des véhicules à faible cylindrée, dont le taux d'émission de CO2 par kilomètre ne dépassera pas les 140 g. "Il y a convergence d'intérêts. En rajeunissant notre parc, nous allons réaliser des économies, mais également réduire notre pollution", explique Jean-Paul Lebourg, chargé de mission à la Modernisation de l'Etat. Actuellement, le parc de l'Etat avoisine les 153 000 véhicules et son entretien coûte quelque 900 millions d'euros chaque année. L'opération permettrait de réaliser 200 millions d'euros d'économies.
La défense en fer de lance
Outre ce rajeunissement, cette réforme (menée par la commission de Modernisation de l'Etat), entérine surtout la nouvelle politique de l'Etat en matière de gestion des flottes. A ce petit jeu, c'est le ministère de la Défense qui donne le La. Finie la gestion en propre, le ministère de la rue Saint-Dominique s'apprête à revendre 21 000 véhicules pour faire appel à des professionnels de la location longue durée. Une externalisation qui n'est pas sans remuer les acteurs du marché. Premier bénéficiaire de ce changement de cap : GE Fleet Services. La filiale LLD du groupe américain vient en effet de remporter un marché estimé à 360 millions d'euros sur 6 ans. GE Fleet Services livrera ainsi 20 120 véhicules à l'Etat entre mai 2007 et juin 2008. Avant le début 2008, GE Fleet Services verra ainsi le nombre de ses véhicules en parc passer de 79 000 à plus de 100 000 unités. Un client atypique pour le groupe US, qui voit donc ici l'occasion de conforter sa place de 6e acteur du marché français.
A client original, conditions particulières. L'ensemble du contrat est basé sur la location avec option d'achat. Pas de "buy back", donc, mais des retours de véhicules prévus au bout de six ans (environ 95 000 km) après leur arrivée au sein du ministère. Des livraisons faisant une fois de plus la part belle aux constructeurs hexagonaux. Le 2e grand gagnant est à ce titre le groupe PSA. Peugeot et Citroën ont en effet été choisis pour fournir les 10 638 VP et 9 482 VUL. Renouvelée sur une période de 14 mois, la future flotte est composée dans sa totalité de véhicules du groupe français. Peugeot réalisant 93 % du contrat, avec notamment 5 000 exemplaires de 207. La marque aux chevrons glanant les 7 % restants avec la livraison de modèles Jumpy et Picasso. Notons que tous ces véhicules seront dotés de motorisations Diesel. "Nous avons consulté un certain nombre de constructeurs. Nous avons choisi le plus compétitif au regard du cahier des charges fixé par le ministère", explique Arnaud Muller, directeur marketing de GE Fleet Services. Un revers pour Renault ? Difficile à dire tant le constructeur a rappelé cette année son désir de réaliser davantage de "ventes rentables". Un deuxième appel d'offre court actuellement sur un marché de 600 véhicules haut de gamme, pour ce même ministère. Les résultats seront connus prochainement. Sur un tel segment, on imagine mal la marque au losange refaire son retard sur PSA. Encore moins, d'ailleurs, sur les spécialistes du genre.
40 000 VO dans les 18 mois
Si cet exemple reste, pour l'heure unique, l'expérience va être attentivement observée. Celle-ci pourrait en effet servir d'étalon à l'ensemble des ministères. Pour l'automobile, il existe, en outre, une autre conséquence directe. Qui dit rajeunissement de parc, dit également revente de véhicules anciens, donc risque d'afflux importants sur le marché de l'occasion. Jusqu'à présent, le service des Domaines, organe chargé de revendre les biens de l'Etat, écoulait ainsi 13 à 14 000 véhicules par an. Soit, approximativement, le nombre de véhicules achetés par l'Etat en une année. Avec ce plan, ce sont près de 40 000 véhicules qui vont déferler sur le marché de l'occasion. "Les ventes devraient s'étaler dans les 18 mois à venir", confie par ailleurs Jean-Paul Lebourg. Pour autant, cette arrivée ne devrait pas bousculer un marché qui s'est situé à près de 5,4 millions de VO vendus en 2006. "Ce sont des véhicules assez anciens mais à faible kilométrage. C'est une offre atypique qui ne peut, à mon sens, cannibaliser les offres déjà existantes", explique Dominique Allain, directeur général d'Eurotax Glass's. La typologie des véhicules que l'Etat s'apprête à mettre à la vente dépasse, en effet, bien souvent les trois ans d'âge. Entretenus par les services de l'administration publique, ces derniers sont souvent bien conservés. Précisons que l'Etat vient d'ailleurs d'imposer le contrôle technique au service des Domaines. Jusque-là, seuls 15 % des voitures qui y étaient vendues en étaient munies. En outre Jean-Paul Lebourg annonce : "Nous voulons porter à 85 % la part de nos véhicules passés au contrôle technique avant d'être vendus". Une volonté qui devrait attester de la qualité des véhicules publics soumis à la vente. La seule incidence notable se situe alors au niveau des marchands. Nombreux sont aujourd'hui les professionnels de la revente à se fournir auprès des Domaines. Des enchères qui regorgent de bonnes affaires, à prix souvent compétitifs. La perspective de belles marges pour les marchands. L'acheteur, quant à lui, devrait également s'y retrouver.
David Paques
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