Ecologie et automobile : je t’aime, moi non plus
Quand les actualités se télescopent : il y a quelques jours, une étude de l’institut Viavoice pour le leader de l’assurance automobile en direct, Direct Assurance, nous apprenait que les Français entendent bien continuer à utiliser massivement leur voiture dans leurs déplacements quotidiens. Pour la rentrée de septembre, ils sont par exemple 84 % à déclarer qu’ils conduiront leur voiture de manière très régulière (44 % tous les jours ou presque et 40 % plusieurs fois par semaine) (1).
Dans le même temps, les résultats du second tour des élections municipales ont apporté leur lot de surprises avec une « vague verte » qui a déferlé dans plusieurs grandes villes de France. "Les écologistes qui n’avaient depuis 2014 que Grenoble dans leur giron, sont désormais à la tête aussi de Lyon (NDLR, la 3ème ville du pays), Bordeaux, Strasbourg, Besançon, Tours, Chambéry, Annecy, Poitiers", résume Pierre-Alain Furbury, dans Les Echos (2). Un bilan qui aurait pu être encore plus spectaculaire, sachant qu’à Lille, Martine Aubry, est passée à deux doigts de la défaite face au Vert Stéphane Baly, et qu’à Toulouse, il s’en est aussi fallu de peu que l’écologiste Antoine Maurice ne devienne le premier magistrat de la ville rose.
Chacun sait qu’écologie et automobile ne s’aiment pas beaucoup. Au prix de raccourcis quelque fois saisissants, autos et camions sont boutés hors des centres-villes. Peu importe que les commerçants éprouvent les pires difficultés à approvisionner leurs magasins ou que les artisans ne puissent plus se garer pour travailler chez leurs clients. Peu importe aussi, qu’au même moment, des avions continuent à survoler ces centres-villes avec leur cortège de désagréments (bruit, pollution…).
La question se pose donc clairement de savoir à quelle sauce seront mangés (ou continueront de l’être) automobilistes et véhicules dans ces municipalités, qui entendent faire de l’usage du vélo « l’alpha et l’omega » des déplacements de leurs administrés. Dans le dernier Baromètre de la Fédération Française des usagers de la bicyclette (FUB), Strasbourg et ses 560 km de pistes cyclables occupe la 1ère place des villes de plus de 200 000 habitants, tandis que Bordeaux pointe en 5ème position devant Lyon (6ème).
Que les mobilités douces occupent une place de choix dans la boîte à outils des maires de France est parfaitement logique, tant l’urgence climatique oblige à changer nos modèles de développement. Mais que l’automobile fasse les frais (et assez systématiquement) des arbitrages de la puissance publique, c’est oublier un peu vite le poids que joue la filière dans l’emploi en France.
Les mesures proposées par les 150 citoyens tirés au sort dans le cadre de la Convention citoyenne pour le climat confirment ce prisme « anti-voiture » : alourdissement des malus, introduction de critères basés sur le poids des modèles, refonte des indemnités kilométriques, interdiction des publicités pour certains modèles…
Alors bien sûr, on objectera que ces propositions sont faites dans un souci de mettre au rebut les véhicules les plus anciens, les plus polluants ou d’accompagner le changement. Dans ce cas alors, pourquoi avoir proposé d’abaisser à 110 km/heure la vitesse maximale sur autoroute, avec les menaces induites par une telle mesure sur l’emploi des quelque 13 000 collaborateurs travaillant sur le réseau autoroutier français ?
L’entêtement à opposer les moyens de déplacements entre eux, en ignorant les avantages et les inconvénients de chacun, permettra difficilement de déboucher sur des solutions pérennes et socialement acceptables pour tous. Avant de jeter définitivement l’automobile à la géhenne, laissons au moins le véhicule électrique jouer son rôle dans la transition énergétique.
L’Arval Mobility Observatory
(1). Etude d’opinion réalisée en ligne par Viavoice pour Direct Assurance, du 24 au 27 avril, puis du 29 mai au 1er juin auprès de 1 001 personnes.
(2). Les Echos (29/06/20) : « Municipales : forte percée des Verts sur fond d’abstention record ».