Ambitions climatiques de Biden : ça va être chaud !
En l’espace de quelques jours, le climat est passé par toutes les couleurs de l’arc en ciel. Mercredi dernier, à la faveur d’un tweet du président Trump encore en exercice, il faisait grise mine puisque les Etats-Unis quittaient officiellement l’Accord de Paris sur le climat. Et puis quatre jours plus tard, changement de décor ; le même climat retrouvait des couleurs et des perspectives avec l’élection du candidat démocrate, Joe Biden, à la Maison Blanche.
"Un deuxième mandat de Trump aurait été ‘game over’ pour le climat", déclare tout net le climatologue américain Michael Mann dans les colonnes du Figaro (1). Avec le nouveau duo Biden-Harris aux affaires, l’horizon devient moins sombre à défaut de s’éclaircir totalement. Les démocrates ne sont pas en effet sceptiques sur la réalité du changement climatique et comptent bien s’y attaquer. Ils ont d’ailleurs annoncé pendant la campagne un plan à 1 700 milliards de dollars pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon de 2050. Irréalisable ? L’avenir le dira.
Mais au moins, une tendance est affirmée pour favoriser les énergies décarbonées en lieu et place du charbon (17 % de la production d’électricité outre-Atlantique), aider les constructeurs automobiles américains à opérer leur transition énergétique et déployer 500 000 bornes de recharge d’ici 2030. Avec Joe Biden, les Etats-Unis, deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre derrière la Chine, sont de retour dans le club des pays jouant la carte du climat.
Le futur locataire du bureau ovale aura aussi fort à faire sur le plan règlementaire pour retricoter ce que son prédécesseur avait patiemment mais consciencieusement détricoté pendant ses quatre années au pouvoir (Clean Power Act, normes d’émissions de CO2 pour les véhicules neufs, règles sur la protection de la vie sauvage). "Selon un état des lieux dressé par le New York Times sur la base des travaux de la Harvard Law School et de la Columbia School, plus de 70 dispositifs règlementaires censés protéger l’environnement ont été démantelés depuis 2016", rappelle le Figaro (1).
Le véritable défi du ticket démocrate nouvellement élu sera de composer avec l’industrie pétrolière américaine et ses intérêts assez largement divergents de ceux des militants pro-climat et de l’électorat de Biden. L’histoire des Etats-Unis est étroitement liée à celle de l’industrie de l’or noir. "C’est grâce à l’abondance d’énergie à bas coût que l’industrie américaine a pu se développer aussi rapidement au début du XXe siècle", rappellent Maxence Cordiez, ingénieur dans le secteur de l’énergie et Benjamin Louvet, gérant matières premières chez OFI Asset Management sur le site Connaissance des Energies (2). Le pétrole a réellement structuré le monde économique américain et s’est aussi largement immiscé dans la classe politique.
Quel avenir, donc, pour le pétrole de « schiste » qui a connu un premier âge d’or sous la présidence de Barack Obama, dont le vice-président était Joe Biden. L’industrie pétrolière serait, selon une étude de Price Waterhouse Cooper, pourvoyeuse de 10 millions d’emplois directs et indirects dans le pays, avec un salaire plus élevé que la moyenne. (3) Baisser la température de la planète risque fort de la faire monter aux Etats-Unis. Et il faudra donc au nouveau tandem de la Maison-Blanche une bonne dose de dextérité et de mesure pour manier avec dextérité la carotte et le bâton…
L’Arval Mobility Observatory
(1). « Un soulagement immense pour les défenseurs du climat ». Le Figaro. 9 novembre 2020.
(2). « Joe Biden président, quelles perspectives pour l’industrie pétrolière américaine ? ». Connaissance des Energies. 9 novembre 2020.
(3). « Impacts of the oil and natural gas industry on the US economy ». PwC. juillet 2017.