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Constructeurs

Un cher record pour la Suisse

Publié le 29 mars 2012

Par Gredy Raffin
7 min de lecture
Le marché suisse a généré au total plus de 1,1 million de transactions de voitures en 2011. L’exercice s’est notamment conclu sur une performance exceptionnelle du VN qui a étouffé le potentiel du marché de l’occasion.
Le marché suisse a généré au total plus de 1,1 million de transactions de voitures en 2011. L’exercice s’est notamment conclu sur une performance exceptionnelle du VN qui a étouffé le potentiel du marché de l’occasion.

L’an passé, les Helvètes avaient un sourire qui faisait plaisir à voir. Depuis bien longtemps, le commerce automobile ne s’était pas aussi bien porté. Une situation qui encourageait l’association des importateurs suisses à faire les plus ambitieux pronostics. Avec 318 958 immatriculations de véhicules neufs, on peut dire que le contrat a été rempli avec succès. Cette progression de 8,4 % par rapport à 2010 permet au marché de réaliser la quatrième meilleure performance de son histoire. Il n’avait pas franchi la barre mythique des 300 000 unités depuis 2001 et affiché de tels volumes depuis la période 1988-1990. Mieux encore, 30 483 autos ont été immatriculées en décembre, prouesse que l’association auto-suisse n’avait jamais recensée à ce jour. Andreas Burgener, le directeur de l’association, s’est félicité de ce résultat, “car le contexte économique ne s’est pas amélioré en cours d’année, avec la crise de l’euro et le franc fort qui en a résulté”, avant d’appeler à la vigilance : “Nous devons maintenant mettre tout en œuvre pour conserver cet élan dans la nouvelle année et pour confirmer ce résultat exceptionnel.”

Il ne faut pas, néanmoins, se leurrer. Cette progression des ventes a été soutenue par une politique de rabais sans précédent. Un fait sur lequel EurotaxGlass’s insiste dans son rapport annuel. “Les achats de nouvelles voitures ont été rendus alléchants, entre autres, par le biais de primes à l’achat et de rabais historiquement élevés”, peut-on lire dans ledit document, qui fustige par ailleurs le net retrait des chiffres d’affaires en découlant. Plus de 20 des 38 marques présentes en Suisse ont ainsi accordé des remises de 15 % en moyenne (N.D.L.R. : prix corrigés selon équipements et primes accordées). Ainsi, après un mois de juin qui mettait un terme à une série de vingt mois de croissance ininterrompue, le deuxième semestre a aligné chaque mois des records d’immatriculations.

Volkswagen en tête avec 12,7 % de part de marché

Comme l’an dernier, Volkswagen a dominé les débats. Le panache en plus. En effet, pour la première fois depuis 1999, la marque dépasse les 40 000 unités (40 594 VN, +20 %) et revendique une part de marché de 12,7 %. Audi et Ford complètent le podium, avec 5,8 % de pénétration (voir tableau). La palme de la croissance revient à Hyundai, que ses 9 976 ventes font progresser de 59,6 %. Notons que la “diésélisation” du parc entamée l’an passé s’est poursuivie (+ 17,4 %), au point de représenter 32,9 % des ventes. Les motorisations alternatives ont quant à elles pesé l’an passé 2,2 % du marché (+ 27,6 %). Et voici le portrait-type d’une voiture vendue en Suisse : sa cylindrée culmine à 1 806 cm3, sa puissance à 147 ch, pour 152 g de CO2 émis, alors que la facture moyenne atteint 38 359 CHF (prix catalogue brut, sans options), soit environ 31 800 euros.

Baisse de la demande, rotation en hausse

Si le marché de l’occasion n’a pas connu la même embellie que le neuf, 802 368 véhicules ont tout de même changé de main l’an passé, soit 26 858 unités supplémentaires par rapport à 2010 et une progression de 3,5 %. Une performance nuancée puisqu’au premier trimestre 2011, les volumes affichaient une hausse de 11 %. Par la suite, la croissance s’est nettement ralentie, à + 6,5 % au second trimestre et à + 3,6 % au troisième trimestre. Urs Wernli, président central de l’Upsa (Union professionnelle suisse de l’automobile), s’est montré inquiet face à cette situation. “Les pertes massives de valeur des occasions pèsent lourdement sur les garagistes suisses. Malgré des ventes en hausse, les entreprises enregistrent au bout de compte un bénéfice plus faible, lequel fait face – en particulier chez les concessionnaires de marques – à des investissements élevés”, a-t-il souligné. Pour leur part, les analystes d’EurotaxGlass’s déplorent une instabilité, voire une baisse, de la demande en VO, si bien que la rotation s’est ralentie très nettement au Tessin (98 jours, + 3,2 %) et dans le Sud-Est de la Suisse (99 jours, + 3,1 %), tout en restant stable à 100 jours dans le Nord-Ouest. En moyenne, elle s’établit à 98 jours (+ 1 %) dans le pays. Les marques constituant le Top 10 du VO totalisent 63 % du marché avec 503 162 unités. Volkswagen prend la tête du peloton (105 848), avec toutefois moins d’aisance que sur le marché des voitures neuves. La faute à des challengers tels que BMW (48 837 unités) et Mercedes (42 468 unités). Sur ce marché, les révélations 2011 s’appellent Dacia (1 508 unités, + 67,7 %), Skoda (13 650 unités, + 20,9 %) et Mini (6 616 unités, + 20,1 %).

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QUESTIONS A... Albert Bonelli, président de l’Union professionnelle suisse de l’automobile (Upsa) section Genève

"Les carnets de commande ne se remplissent pas aussi vite"

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. En votre qualité de président, quels sont les enseignements que vous tirez de cette année 2011 ?
Albert Bonelli.
Ce fut une excellente année pour l’ensemble de la profession, même si nous avons été confrontés à des problèmes découlant du franc particulièrement fort. Certains importateurs ont su réagir pour rester compétitifs, notamment face à une concurrence française favorisée par une quasi-parité des monnaies. Nous avons dû consentir à des rabais de 15 % environ, ce qui a impacté négativement notre rentabilité. Les marques japonaises ont, à mon sens, plus souffert entre un yen fort et des délais de livraison allongés. La progression des immatriculations n’est pas à mettre au seul crédit des concessionnaires car un réseau d’importation parallèle nous a également fait concurrence avec des voitures “0 km”.

JA. Qu’en est-il du marché VO ?
AB.
Il y a de réelles différences entre les régions. Ce qui nous permet de mener un jeu d’échange de véhicules entre professionnels, selon nos besoins. Avec un taux de change de 1 euro pour 1,20 franc suisse, nous avons dû repositionner nos produits, soit une baisse de 20 % des tarifs. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que le “0 km” est plus intéressant que le VO récent, mais que les concessionnaires ont su tirer parti de la parité pour gagner en compétitivité.

JA. Quid de 2012 ?
AB.
On a tendance à dire que ce sera une année de croissance. Un sentiment conforté par les résultats des premiers mois. Pour autant, il faut rester prudent car il s’agit de livraisons et les carnets de commande ne se remplissent pas aussi vite. Sur les parcs VO, les stocks sont encore forts chez les marchands qui refusent de s’aligner aux dépens du chiffre d’affaires. Reste une dernière inconnue : l’entrée en vigueur de la taxe sur le CO2, au 1er juillet prochain. Elle s’adresse aux constructeurs, mais elle se répercutera en fin de compte sur les consommateurs.
Propos recueillis à Genève par Gredy Raffin

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ZOOM - Pascal Dorsaz, directeur de COB à Lausanne

“En 2011, nous avons vendu 717 véhicules d’occasion, contre 735 l’année précédente. Notre offre est teintée de diversité car nous refusons de nous limiter aux seuls produits à fort volume. La plupart des véhicules que nous proposons sont issus de reprises à particuliers. Ils ont entre 3 et 5 ans, et se situent à hauteur de 19 000 francs suisses (N.D.L.R. : environ 15 700 euros), soit les prix moyens du marché sur lequel nous évoluons. Le marché suisse se heurte à une problématique créée par les constructeurs et les importateurs : la profusion de VO “0 km”. Le marché de l’occasion souffre déjà suffisamment de la concurrence du VN pour être, en plus, pollué par des voitures qui brouillent le positionnement. Chaque jour, nous refusons des propositions pour des VO de moins d’un an qui nous viennent de Suisse et de toute l’Europe. Si nous les avions acceptés, je pense que notre bilan financier en aurait souffert dangereusement. A l’image des grands groupes, la croissance dans notre pays s’est faite aux dépens de la rentabilité. Elle est artificielle. Nous-mêmes avons dû parfois répercuter l’équivalent de la remise VN sur nos VO afin de tenir le rythme de croisière. Il y a un travail d’assainissement à faire en 2012, quitte à boycotter certains segments que je qualifierais de destructeurs.”

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