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Constructeurs

Radiographie d’une success-story

Publié le 21 avril 2015

Par Alexandre Guillet
7 min de lecture
Nous avons sollicité Denis Schemoul et Ronan Noizet, analystes chez IHS, pour mettre en lumière quelques éléments de la réussite de BMW Group sous la présidence de Norbert Reithofer. Où il apparaît que Norbert Reithofer a quasiment réalisé un sans-faute tout en plaçant le groupe sur orbite pour des succès futurs. Extraits.
Nous avons sollicité Denis Schemoul et Ronan Noizet, analystes chez IHS, pour mettre en lumière quelques éléments de la réussite de BMW Group sous la présidence de Norbert Reithofer. Où il apparaît que Norbert Reithofer a quasiment réalisé un sans-faute tout en plaçant le groupe sur orbite pour des succès futurs. Extraits.

Une croissance confirmée jusqu’en 2020

Pour illustrer le changement de dimension en volume de BMW ces dernières années, un chiffre vaut mieux qu’un long discours : ainsi, entre 2007 et 2015, les marques BMW et MINI ont enregistré une croissance annuelle moyenne de 6 % ! “Sous l’impulsion de Norbert Reithofer, le développement a naturellement été très marqué en Chine et même si la marque BMW reste derrière Audi, elle a gagné 450 000 ventes en l’espace de sept ans”, indique Denis Schemoul. Pour les consultants d’IHS, BMW est le groupe qui fait valoir le meilleur équilibre de portefeuille de marchés, grâce à une couverture très homogène. “A cet égard, l’évolution récente de la ventilation des ventes mondiales est éloquente. En 2007, l’Asie pesait 11 % des ventes du groupe, l’Amérique 26 % et la zone EMEA 63 %. En 2014, l’Asie représente 32 % des ventes du groupe, l’Amérique 22 % et la zone EMEA 46 %”, détaille Ronan Noizet. Et concernant la période 2015-2020, les perspectives sont favorables, même si le rythme de la croissance devrait ralentir (de l’ordre de 4 % en moyenne chaque année), comme pour les deux principaux concurrents Audi et Mercedes-Benz, sous l’effet conjugué du ralentissement attendu de la progression du marché chinois et des limites atteintes dans l’hyper-segmentation. “Toutefois, on peut avancer que Norbert Reithofer laisse BMW avec un plus fort potentiel de croissance que Mercedes-Benz ou Audi. BMW a notamment encore des opportunités de nouvelles silhouettes sur le segment C, tandis que MINI peut se diversifier sur les segments B et C”, soulignent nos analystes. La concurrence au sein du Premium restera néanmoins féroce et il y a fort à parier que la marque Audi pourrait dépasser BMW (hors MINI) dans les années à venir (2016 ou 2017) en volume de ventes. Norbert Reithofer l’a d’ailleurs reconnu mi-mars devant la presse mondiale, même s’il faut y voir “un symbole plus qu’un warning, d’autant qu’à la fin de la décennie, BMW devrait à nouveau être en pole”, dixit Denis Schemoul.

Une excellence industrielle teintée d’audace

Dans le domaine névralgique de la gestion de l’outil industriel, basé sur l’indice de référence du taux d’utilisation des capacités des usines qui a un impact direct sur la rentabilité, le groupe BMW apparaît clairement aux avant-postes du secteur automobile. “C’est le leader mondial avec le groupe Hyundai-Kia”, assène Denis Schemoul, avant d’ajouter : “Le groupe s’est montré précurseur pour la notion de réseau de production, articulé autour d’une logique de plates-formes. L’exemple de la Série 3 et de ses dérivés est représentatif, avec une architecture reposant sur l’Afrique du Sud, l’Allemagne et la Chine et désormais le site mexicain. Au Brésil, on peut ajouter que BMW a fait preuve d’audace, car dès que le régime “Inovar-Auto” a été mis en place, le groupe a voulu ouvrir une usine dans le pays, devançant Audi et Mercedes-Benz”. Là encore, on peut y voir un leitmotiv de la présidence de Norbert Reithofer, notamment au niveau des méthodes (systèmes de rotation à 10 ou 11 h 30, sites paramétrés pour fonctionner six jours au lieu de cinq, etc.). L’usine de Leipzig s’affirme comme le porte-étendard de cette démarche, comme les extensions mises en œuvre en Chine ou à Spartanburg, aux Etats-Unis. La stratégie d’alliances du groupe est évidemment intégrée dans cette partition et Ronan Noizet cite en exemple le cas d’école de la collaboration avec Toyota, notamment le remplacement du Z4, ou la naissance de la marque Zinoro en Chine, via la coentreprise avec Brilliance.

L’environnement comme viatique

BMW a intégré très tôt l’importance qu’allaient prendre les défis environnementaux pour la filière automobile dans son ensemble. Le groupe a notamment frappé les esprits avec le programme Efficient Dynamics, qui a de surcroît ajouté l’efficacité commerciale à la vertu, principalement sur le segment des flottes. L’audace est nouvelle fois de la partie et le groupe n’a pas hésité à réaliser des investissements significatifs sur les nouveaux matériaux, fibre de carbone en tête. Avec SGL, BMW disposera bientôt de la plus grande usine de fibre de carbone au monde. “Le travail sur les motorisations et l’arrivée sur des segments de véhicules de taille plus modeste ont permis à BMW de faire des progrès notables sur la diminution de la cylindrée moyenne au sein du groupe, cette dernière passant de 2,5 litres à 2,1 litres entre 2007 et 2015. Simultanément, la part des véhicules “propulsion” est passée de 63 % en 2007 à 53 % en 2015, celle des transmissions intégrales de 21 % à 28 % et celle des tractions de 15 % à 19 %”, détaille Ronan Noizet. Dans le registre de la réduction des émissions polluantes, impossible de ne pas évoquer la création de la marque BMW i. “Les objectifs étaient ambitieux et malgré un marché de l’électromobilité peinant à prendre son envol, ils ont presque été atteints. Le groupe a ainsi produit quelque 20 000 BMW i3 en 2014, s’installant dans le top 3 mondial avec la Nissan Leaf et Tesla Model S. Et quand la production de la i3 a baissé fin 2014, ce n’était pas faute de commandes, mais en lien avec les fournisseurs”, explique Denis Schemoul, avant d’ajouter : “Cette nouvelle marque s’affirme aussi comme une réussite technologique, une de plus pour le groupe, et comme un succès marketing, avec un savant dosage entre parti-pris, la i8 en étant l’acmé, et compromis, le choix du range-extender s’étant révélé payant”. A l’avenir, la gamme i est appelée à s’étoffer, notamment avec un modèle plus spacieux que la i3, mais si “i5” il y a, le véhicule se distinguera encore par une silhouette alternative.

MINI et Rolls-Royce, bien plus que des compléments !

Dans son ensemble, la marque MINI est un vrai succès et les résultats du Countryman, plus de 100 000 unités produites ces quatre dernières années, en attestent. La stratégie de diversification de la gamme a cependant aussi eu des résultats parfois plus nuancés, le coupé roadster et surtout le Paceman n’ayant pas convaincu. Dès lors, pour nos analystes, la nouvelle stratégie définie pour la marque va dans le bon sens : “Auparavant, nous avions une marguerite MINI avec plusieurs pétales et aujourd’hui, nous allons avoir cinq fleurs MINI à part entière. Pas une multiplication de versions, mais cinq véritables modèles avec des territoires propres. Au vu de la force de l’image de la marque, on peut tabler sur un succès commercial dans les prochaines années”. A propos de Rolls-Royce, Denis Schemoul est catégorique : “Rolls-Royce demeure à part et plus aucune marque ne court vraiment derrière elle en termes de prestige”. Avec l’essor programmé du segment de l’hyper-luxe, la croissance est assurée et la marque a déjà dépassé les 4 000 ventes en 2014, un chiffre historique. “La marque a su redevenir hyper-exclusive et on constate que la concurrence peine à suivre. Tout simplement parce que le capital-image de la marque est inégalable, on peut d’ailleurs faire un parallèle avec Ferrari dans le domaine sportif. Cependant, la bataille des SUV sera intéressante à suivre dans cette niche”, poursuit Ronan Noizet.

De la solidité du Premium allemand

Le trio du Premium allemand domine son marché à l’échelle mondiale et à l’horizon 2015-2020, aucune marque n’est susceptible de venir modifier le podium. “Il y a cependant des outsiders intéressants pour les années futures, comme Jaguar Land Rover, Infiniti, ou encore Alfa Romeo et dans un autre registre, DS”, glisse Denis Schemoul qui rappelle cependant la froideur des chiffres : en dix ans, l’écart de ventes entre BMW, Audi, Mercedes-Benz et tous les autres concurrents s’est accentué. Chaque membre du trio allemand est au-dessus des 2 millions d’unités par an, quand le deuxième groupe (Jaguar Land Rover, Lexus, Volvo…) se situe aux alentours des 600 000 ventes, le troisième groupe (Infiniti, Cadillac) sous la barre des 400 000 ventes et le quatrième (tous les autres) sous le seuil des 300 000 ventes. Une hiérarchie difficile à remettre en cause et au sommet de laquelle trône donc BMW.
 

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