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Constructeurs

Le défi Twizy

Publié le 29 juin 2012

Par David Paques
9 min de lecture
Après Fluence et Kangoo ZE, et quelques semaines avant de lancer officiellement sa Zoé, Renault a récemment dégainé l’un des produits les plus attendus de sa gamme électrique. Style atypique, positionnement hybride, marché vierge… la Twizy débarque avec le plein d’interrogations.
Produite sur une chaîne d’assemblage spécifique à Valladolid, en Espagne, la Renault Twizy ne devrait souffrir d’aucune sous-capacité de production. “Nous pouvons multiplier la production par trois si besoin est, en fonctionnant sur trois équipes”, nous indique le constructeur.

De longs mois avant ses hypothétiques concurrents, Audi Urban, Volkswagen Nils et autre Opel Rak-e, Renault Twizy défriche aujourd’hui un nouveau marché. Celui des petits véhicules biplaces urbains Zéro émission. Après trente-six mois de développement (à partir du retour d’intention) et deux ans et demi d’essais, la marque a donc récemment lancé son Twizy. Sur fond de musique électronique orchestrée par le couple David et Cathy Guetta, incarnation de la “branchitude” et ambassadeurs du modèle, Twizy doit électriser un public jeune, urbain, pressé, connecté et surtout apte à s’affranchir de certains codes. En matière de propulsion, comme de mobilité de manière générale. C’est là le cœur de l’équation que devront résoudre les forces de vente terrain du constructeur et de ses concessionnaires. Dans sa version 45, le Twizy est limité à 45 km/h et se cantonne donc à un espace strictement urbain. Dans sa version quadricycle lourd, il peut s’autoriser des trajets sur autoroute. Sauf en Italie, au Portugal et… en France. Dans l’Hexagone, le Twizy peut, en revanche, accéder aux voies rapides, comme le périphérique parisien par exemple. Pour ces raisons, l’engin est susceptible de ne pas intéresser la clientèle deux-roues urbaine, adepte du remonte file… que les proportions du Twizy ne permettent sans doute pas.

Cibles multiples

Avec moins de 3,30 m au sol, soit 30 cm de moins qu’une Smart, en longueur comme en largeur, et un poids de 445 à 473 kg, dont 100 kg de batterie, Twizy joue incontestablement la carte de la maniabilité. En témoigne son rayon de braquage de 3,4 m. “Soit 30 cm de mieux qu’une Toyota IQ et 1,5 m de mieux que Twingo !”, se félicite la marque. Dans sa version 45, le Twizy est accessible dès 16 ans et sans permis. “C’est alors une alternative aux scooters 50 cm3 ou aux voiturettes sans permis”, estime le constructeur. Dans sa version “débridée”, le modèle chasse sur un autre terrain. “Celui des micro-cars urbains comme Smart, Toyota IQ ou même du Piaggio MP3.” La marque n’hésite d’ailleurs pas à comparer ses performances à ceux du trois-roues du constructeur italien. “Dans sa version quadricyle lourd, Twizy effectue le 0 à 50 m en 6,5 s, contre 7,2 pour le Piaggio MP3”, nous fait-on, en effet, savoir. Ce n’est pas sur ce terrain que Renault peut être à court d’arguments.

Mais une question centrale peut naturellement revenir dans le discours d’éventuels prospects : l’autonomie. Twizy peut afficher jusqu’à 100 km d’autonomie en cycle urbain. La marque annonce ainsi une moyenne de 70 à 80 km en fonction du style de conduite et 50 à 55 km pour une utilisation sportive. “Or, nos études montrent qu’un scooter réalise environ 35 km par jour en Europe”, insiste le constructeur. Suffisant, donc. D’autant que le câble de recharge se branche sur une simple prise 220 volts. Une charge complète s’effectuant en trois heures trente (le plein est estimé à 0,70 euro). Faut-il encore pourvoir charger son véhicule. Et ressurgit inévitablement la question de l’infrastructure. C’est depuis longtemps la problématique majeure des VE. Les choses avancent. Doucement. A Paris, principalement. Renault annonce ainsi qu’il existe aujourd’hui 300 bornes de recharge électrique dans la capitale. Un nombre qui devrait passer à 1 300 d’ici la fin de l’année, selon le constructeur. Par ailleurs, si un client tombe en panne avec son Twizy, Renault s’engage à venir le dépanner.

Twizy marque des points

“Le mot d’ordre était d’avoir quelque chose de sérieux et de ludique. Nous avons exploré pleinement ces deux impératifs. C’est pour cette raison que nous avons souhaité installer un airbag frontal alors que la législation des quadricycles ne nous y oblige pas”, explique Didier Gouteron, chef du département ingénierie chez Renault Sport Technologies. En matière de sécurité, le constructeur a, en effet, décidé de ne pas transiger. En témoigne cette 2e ceinture latérale pour le conducteur. Au crash test, le véhicule s’en tire ainsi avec les honneurs. Twizy affiche, en effet, une résistance à un choc frontal à 50 km/h. Quant au test du poteau latéral, Twizy résiste à 29 km/h. “Nous avons analysé la typologie des accidents en ville et avons travaillé dessus. Je peux affirmer que Twizy est très bien armé. Nous sommes mêmes larges !”, détaille Didier Gouteron. Un point pour Twizy face aux deux-roues.

Et le petit véhicule de Renault tente même de faire la différence au niveau de l’agrément. Les portes à ouverture en élytre, affichées en option à 590 euros, n’ont rien d’une coquetterie. “Cela stoppe les projections d’eau sur les pieds, mais c’était également une demande de la clientèle féminine qui souhaitait cacher ses jambes”, raconte Didier Gouteron (pour les versions sans portes, Renault propose une jupe de protection). Encore un point pour Twizy, qui compte également sur des équipements tels le kit radio Parrot, l’avertisseur de recul, le signal sonore pour piétons, ou encore sur les deux kits de stickers qui permettent une certaine personnalisation, pour séduire cette fameuse clientèle deux-roues tout en ne déroutant pas celle des voitures classiques.

Pourtant, tabler sur l’unique cible des particuliers reviendrait à oublier le côté pratique du véhicule. En termes de coût d’utilisation, comme de mobilité. Autant d’atouts taillés pour séduire également les professionnels. Des carrossiers travaillent d’ailleurs actuellement à des versions de Twizy avec une place arrière condamnée afin d’y loger une cellule de chargement. Ce qui permettrait à Renault d’attaquer toute une catégorie d’entreprises de manière plus agressive. Notons qu’au sein de la direction commerciale France, une équipe est du reste en charge de rencontrer municipalités, hôtels, parcs d’attractions et autres parcours de golf afin de faire la promotion de Twizy. Son premier client, un livreur de plats bio à domicile, en a commandé 6 exemplaires. A la fin de l’année, la flotte française d’Orange comptera pour sa part 100 exemplaires.

771 immatriculations à fin avril

Côté tarif, Twizy 45 s’affiche de 6 990 à 7 790 euros et Twizy entre 7 690 et 8 490 euros, hors incitation fiscale. Pour l’instant, niveau incitation, seule la région Poitou-Charentes offre une aide de 1 000 euros. Certaines autres régions statuent actuellement. Seule certitude, de par son statut de quadricycle, Twizy ne peut en revanche pas prétendre au super bonus de 5 000 euros promis aux véhicules zéro émission. Au prix catalogue, s’ajoute ensuite la location de batterie à 50 euros par mois TTC pour 7 500 km/an et 36 mois. C’est l’offre de base. Mais voiture ou quadricycle, le constructeur commercialise son modèle dans les mêmes conditions qu’un quatre-roues lambda. Tous les modes d’acquisition sont, en effet, possibles : LCD, LLD, New Deal, crédit classique… Les équipes du constructeur travaillent même à la formulation d’une offre de LOA agressive. Celle-ci devrait apparaître dans les semaines qui viennent.

Alors que Renault a lancé son véhicule le 19 avril, la marque ne souhaite donner aucun objectif chiffré en matière de volumes. A l’ouverture des carnets de commandes, le constructeur n’avait vu que 500 des 10 000 pré-réservations se transformer en commandes fermes. Les distributeurs ont commencé les livraisons. Ce qui a permis à la marque d’afficher déjà 771 immatriculations de Twizy à fin avril, devant Kangoo ZE (649 VN), mais juste derrière la Bluecar de Bolloré (982 VN).

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La Twizy en bref

Date de lancement : 19 avril 2012
Segment de marché : quadricycle lourd
Objectif de ventes France : 2 500 (estimations JA)
Principales Concurrentes de la Renault Twizy Color 7 990 € :
Piaggio MP3 300LT Hybrid 8 549 € ;
Smart Fortwo 61 mhd Pure 9 990 €
Prix :
de 6 990 à 7 790 € - Twizy 45
de 7 690 à 8 490 € - Twizy

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ZOOM - Le réseau est déjà branché

En France, le réseau a investi 21 millions d’euros pour préparer la commercialisation des véhicules électriques de la marque. Les 398 sites primaires du réseau hexagonal disposent, en effet, de bornes. Aujourd’hui, la marque annonce même 2 200 points de charge dans le réseau. Pour le reste, côté showroom, cela se traduit par un corner dédié avec un carrelage spécifique. A l’atelier, la donne est différente. Pour intervenir sur les véhicules, les distributeurs de la marque se sont équipés d’un adaptateur de pont et d’un outillage spécifiques. Aujourd’hui, 169 points de vente, sur les 729 que compte le constructeur en France, ont été nommés “Experts ZE”. Dans ces centres, les opérateurs ont pour obligation de disposer de deux mécaniciens et d’un carrossier habilités. Ces techniciens ayant tous suivi cinq jours de formation.

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ZOOM - Développé par Renault Sport

“Nous ne partions d’aucune base existante. Il fallait une équipe différente”, explique Didier Gouteron, chef du département ingénierie chez Renault Sport Technologies, en charge du projet Twizy. C’est donc entre les bancs d’essai de Renault Sport F1 à Viry-Châtillon (91) et les bureaux d’études de Renault Sport Technologies, basés aux Ulis (91), que Twizy a été conçu. Côté investissement, malgré un taux de réutilisation de pièces inférieur à un véhicule classique (notons, par exemple, que le volant est issu de Laguna), Renault assure que la facture n’a rien de pharaonique. “Le coût de développement est significatif, mais il est moins élevé que pour un véhicule classique. Tout est petit. Il y a deux fois moins de pièces que dans une Clio… Disons que c’est à peu près comparable au développement d’un facelift pour un véhicule de 10 ans”, explique Niels Saclier, directeur de programme adjoint véhicules électriques.

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FOCUS - Quid des valeurs ­résiduelles…

Twizy réunit deux problèmes pour établir des prévisions de valeurs résiduelles cohérentes. C’est à la fois un véhicule électrique et un quadricycle, à cheval entre l’univers du deux-roues et celui des véhicules, sans toutefois avoir le statut de l’un ou de l’autre. Il est donc difficile de trouver des points de comparaison pour les organismes de cotations.

… et de l’assurance
Au niveau de l’assurance, peu d’éléments concrets pour le moment. Le positionnement d’Axa par rapport à Twizy nous renseigne ainsi quant à la place du véhicule en la matière. L’assureur demande 350 euros par an sur Paris, pour un bonus 50. “C’est 15 % de moins que pour un Piaggio MP3”, se félicite la marque.

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