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Constructeurs

La bataille de la voiture électrique européenne est-elle perdue ?

Publié le 11 décembre 2020

Par Catherine Leroy
4 min de lecture
Un récent rapport de France Stratégie pointe du doigt les erreurs fiscales et stratégiques des différents gouvernements français qui ont entraîné l’hémorragie de la production automobile sur le sol national et européen. L’émergence du véhicule électrique va-t-elle changer la donne ou accélérer la prédominance de la Chine dans notre industrie ?
L'industrie asiatique détient déjà 80 % du marché de la batterie électrique.

 

Comment les constructeurs européens peuvent-ils se défendre face à la prédominance des industriels chinois dans la technologie des véhicules électrifiés ? Un récent rapport de France Stratégie pointe du doigt les stratégies industrielles de l'Etat français depuis des décennies, qui ont conduit à de vastes délocalisations et à la perte d'indépendance de nos constructeurs issue de la déferlante des véhicules électrifiés.  

 

2008 : la France cède à l'Allemagne

 

Depuis le début des années 90, les constructeurs français s’étaient positionnés sur le segment des petites voitures légères et économes en carburant, notamment à partir de la technologie Diesel. Un avantage financier jusqu’en 2008, date à laquelle l’exécutif français cède aux volontés de l’Allemagne : définir les objectifs de réduction de CO2 en fonction du poids des voitures. 

 

Jusqu’à cette date, Renault, PSA et Fiat avaient réussi à éviter cette modulation au niveau européen. Cet avantage, selon le rapport, instaure un bonus sur le poids qui s’élève à 3 euros du kilo en 2020 : ainsi les constructeurs sont plus ou moins encouragés à produire des véhicules plus lourds en arrêtant la production de modèles plus légers comme notamment la Fiat Panda, la Ford KA, la Peugeot 107/Citroën C1. Les faibles niveaux de marge sur ces véhicules ne permettent plus d’absorber le coût de dépollution et de baisse des émissions de CO2.

 

Cet arrangement européen oblige la France à se positionner sur des véhicules lourds et plutôt haut de gamme, seule condition pour continuer à produire des véhicules sur un sol français où les coûts de production sont plus élevés.

 

Les crash-tests ne font plus peur aux Chinois

 

Jusqu’à présent, l’industrie automobile chinoise n’était pas parvenue à passer les frontières européennes notamment à cause de normes de sécurité sur lesquelles ces derniers échouaient. Tout le monde se souvient, en 2005, de l’échec retentissant de la marque Landwind lors d'un crash-test EuroNCap, dont l’arrivée en Europe a été tuée dans l’œuf. Mais l’émergence de véhicules électriques réduit la difficulté, toujours selon France Stratégie, pour les Chinois de respecter les normes de sécurité. "L’architecture de la voiture devient plus flexible, le moteur électrique étant plus compact, les contraintes sur les crash-tests sont également plus faibles."

 

D’ailleurs, le phénomène se vérifie dans les faits : la Polestar 2 (marque appartenant à Volvo désormais propriété de Geely) est produite à Chengdu et commercialisée en Europe, MG rachetée par SAIC en 2007 a débuté la commercialisation de son premier modèle en France depuis cet été, Lynk&Co qui est la propriété également de Geely commence son implantation en Europe par les Pays-Bas mais devrait très vite arriver en France.

 

Lire également : Les constructeurs chinois à la conquête de l'Europe avec des VE 

 

De leur côté, les constructeurs européens font de la Chine leur base industrielle pour les véhicules électrifiés. En témoignent notamment la décision de DS Automobiles de produire la DS 9 à Shenzen, celle de BMW d’assembler sont iX3 à Shenyang ou encore de la Dacia Spring également produite dans l'Empire du Milieu.

 

La bataille pour une production européenne voire française est-elle définitivement perdue ? Si l’on en croît le déplacement du savoir des constructeurs (les motorisations) vers le cœur du véhicule électrique à savoir les batteries, la réponse pencherait plutôt vers le oui.

 

Même si la France a décidé avec l’Allemagne de lancer son Airbus des batteries qui devrait se concrétiser par la création de deux usines de production de batteries sur le sol européen. Cet investissement compris entre 5 et 6 milliards d’euros, dont 1,2 milliard d’euros d’argent public pourrait permettre l’émergence d’une industrie maison, face à des acteurs déjà majoritairement asiatiques. Ce marché de la batterie, dont il faut se souvenir qu’elle constitue environ la moitié du coût d’une voiture électrique, est dominée à plus de 80 % par des industriels asiatiques, tels que LG, Panasonic, CATL ou encore BYD.

 

Imposer la batterie recyclable et l'électricité décarbonée

 

Mais une récente décision de l’Union européenne de revoir la législation sur les batteries en plaçant de nouvelles exigences comme l’utilisation de ressources responsables avec un usage limité de substances dangereuses pourrait favoriser l’industrie européenne.

 

Cette décision prévoit qu’à compter du 1er juillet 2024, "seules les batteries industrielles rechargeables et les batteries de véhicules électriques ayant une empreinte carbone déterminée pourront être mises sur le marché."  Une bonne nouvelle pour l’industrie française et européenne à condition que la France notamment, qui subventionne la production de batteries électrique en Pologne avec une électricité qui se situe parmi les plus carbonées dans le monde avec 747 grammes de CO2  par kWh, stoppe ces subventions.

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